L’histoire dit qu’il abusa de substances altératrices de vérité dans sa jeunesse. L’histoire dit aussi qu’il écrivit son premier roman dans les coulisses d’une distillerie. Que dix années s’écoulèrent avant que son chef-d’œuvre voit le jour, et soit reconnu dans les sphères de la littérature. C’est couronné du British Book Award pour Man and Boy que Tony Parsons a poursuivi l’aventure et nous propose Le club des pendus.
Dans un Londres métro-boulot-dodo, une bande de pseudo-justiciers décide de se faire bourreau pour méchants ambulants. Pire, ils filment les exécutions et les diffusent sur les réseaux sociaux. Les londoniens vachement moins indifférents tergiversent en débats stériles et compromis foireux. Faut-il défendre ou louer ces inquisiteurs de la justice ?
Max Wolfe est en charge de l’enquête, et son intuition (qui ne lui fait jamais défaut) lui affirme que l’affaire est plus complexe qu’elle en a l’air. Entre culpabilité de devoir se plier à un système qui libère des coupables parce que l’enquêteur n’a pas rempli le formulaire bleu et des juges cupides aux courbettes faciles, le cœur de Max Wolfe balance.
En attendant, le Club des pendus continue son office, inspiré par Albert Pierrepoint, le mec à qui on laissait le pain côté croûte moche sur le dessus quelques années auparavant. Kidnapping, séquestration, découpage de paupière et privation d’oxygénation par pendaison, de quoi occuper tout un bataillon d’enquêteurs de la criminelle, de la pince à épiler les prélèvements au dénombrement de pétéchies au microscope, des experts de la matière pullulent dans les sous-sols de la police londonienne.
En creusant un peu, Max fait rapidement le lien entre les victimes et les pontes de la politique de comptoir locale. Ses supérieurs en personne lui somment d’arrêter d’embêter ce pauvre vieux qui a perdu son fils renversé par un conducteur ivre. Parce que nous n’aurions pas envie de nous venger à sa place ?
C’est avec une facilité déconcertante que l’enquêteur de choc réalise qu’il est le pion dérangeant dans un système rodé au silence et inapte à la justice aveugle et égalitaire. Saura-t-il tirer avantage de cette position pour un échec et mat ?
Le club des pendus est un roman policier à aligner avec les classiques du genre : un justicier du côté des lois contre des justiciers sauvages. Un petit David contre le système Goliath. Une petite souris qui tire la barbichette de l’éléphant confortablement installé dans ses habitudes. Sans surprise et avec les rebondissements ponctuels.
Mais pas seulement. La sobriété des descriptions et des emplacements laissent libre court aux détails, permettant à Tony Parsons de nous renvoyer les questionnements de son héros. Hormis le passage "consolé par la collègue sexy qui est la seule à le comprendre", le roman remet en question le système judiciaire sur lequel nous nous reposons par paresse ou habitude, sans creuser ses failles.
Failles sans lesquelles ce roman n’existerait pas, mais failles laissant des violeurs dans la nature et des assassins chez les marchands d’arme. Easy lecture et recette qui fonctionne, Tony Parsons divertira un dimanche sans prétention chez belle-maman.
La justice est-elle vraiment là où on le croit ? Vous avez deux heures. |