Comédie dramatique écrite et mise en scène par Wajdi Mouawad, avec Jalal Altawil, Jérémie Galiana, Victor de Oliveira, Leora Rivlin, Judith Rosmair, Darya Sheizaf, Rafael Tabor, Raphael Weinstock et Souheila Yacoub.
Avec "Tous des oiseaux", déclinant à nouveau la situation de la quête des origines et de l'identité individuelle et le thème du secret de famille, Wajdi Mouawad crée des personnages archétypaux qui lui permettent, à partir de l'argument classique de l'amour, tant l'amour impossible à la Roméo et Juliette que l'amour humaniste qui peut, à titre universel, conduire au mythe contemporain du "vivre ensemble", de traiter ses thématiques de prédilection. Dans une bibliothèque de New York, un jeune généticien d'origine juive allemande (Jérémie Galiana) rencontre une historienne arabe libano-américaine (Souheila Yacoub) qu'il accompagne en Jordanie sur les traces du théologien et diplomate Hassan al-Wazzan, plus connu sous le nom de Léon l'Africain, sujet de sa thèse. Au cours d'une halte en Israêl ou réside une grand-mère inconnue (Leora Rivlin) qui a divorcé en abandonnant mari et enfant en bas âge pour émigrer en Terre promise, il est victime d'un attentat terroriste mettant sa vie en danger qui occasionne une violente confrontation familiale avec un grand-père rescapé de l'Holocauste (Rafael Tabor), un père traditionaliste atteint du syndrome de la culpabilité du survivant et farouche défenseur du devoir de mémoire (Raphael Weinstock) et d'une mère psychanalyste athée mais attachée à la notion de peuple élu (Judith Rosmair). Dans un scénographie de monolithiques cimaises modulables à la monumentalité grandiloquente conçue par Emmanuel Clolus, Wajdi Mouawad présente un opus qui, par la toile de fond de l'ancestral antagonisme Orient/Occident, la multiplicité géographique et la pluralité linguistique, le spectacle est décliné en quatre langues hors le français, emprunte à l'ouvrage de l'écrivain Amin Maalouf justement consacré à une autobiographie imaginaire à Léon l'Africain.
Par ailleurs, la partition - fleuve et conforme aux fondamentaux de l'auteur - de ce drame familial est élaborée sur le mode dialectique classique opposant déterminisme et existentialisme - un jeune homme s'inscrit dans une trajectoire d'émancipation pour, selon une terminologie contemporaine, "écrire le scénario de sa propre vie" - dans le cas de figure particulier de la judéité. Ainsi le débat porte notamment sur le poids des droits, devoirs et obligations résultant du lien et de l'héritage familial ressentis comme un fardeau aliénant et une entrave à la liberté individuelle tout comme les événéments du passé historique, débat qui dépasse l'ancrage de l'espèce en ce qu'il concerne la jeune génération pour laquelle le monde n'existe que dans un présent autocentré.
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