Comédie satirique d'après le texte éponyme de Jean Genet, mise en scène de Alfredo Arias, avec Alfredo Arias, Marcos Montes, Adriana Pegueroles et Alejandra Radano.
Alfredo Arias a endossé bien des costumes et travestissements mais celui du Souverain Pontife manquait à son exubérant vestiaire.
Voilà auquel il est remédié et Pablo Ramirez lui a confectionné un ébouriffant accoutrement à l'allure de culbuto pour interpréter Sa sainteté telle que surnommée "Elle" dans l'opus éponyme inachevé et posthume de Jean Genet.
Alfredo Arias a enchassé la courte partition iconoclaste, qui malmène la figure du pape en la renvoyant au simulacre et au vide aussi bien métaphysique que mystique, mais avec Genet la frontière entre mécérance et mystique est aussi fine qu'une feuille de papier bible, entre deux textes édifiants - le Pape libertin du Marquis de Sade et le pape inhumain conspué dans l'ode "A un pape" par Pier Paolo Pasolini - qui fustigent ses manquements aux vertus théologales et aux missions de la charge de celui qui est magnifié comme le représentant de Dieu.
Sur un plateau quasiment vide n'étaient les emblèmes liturgiques, trône pontifical et prie-Dieu éclairé comme une scène de music-hall par Jacques Rouveyrollis, se déroule une farce roborative ancrée sur une situation anecdotique, celle d'une séance de photographie destinée à réaliser le portrait officiel du Saint Père qui doit orner les chaumières de plusieurs millions de fidèles.
Ainsi, dans l'attente de l'arrivée du pape, un huissier psychorigide (Adriana Pegueroles) délivre une leçon protocolaire à un photographe (Alejandra Radano) vêtu d'un costume militaire, qui évoque celui des soldats allemands de la Seconde guerre mondiale, et coiffé d'un chapeau melon magrittien.
Celui-ci se montre aussi impatient qu'ému par la noble tâche qui lui est confiée, celle de "révélateur" de la vérité papale, soit non un esprit divin mais un homme dans son ordinarité vulgaire et blasphématoire qui, de sucroît, tel un acteur, et c'est bien cela qu'il est, cabotine.
Et, entre les apparitions d'un cardinal folâtre en chape de soie et bas rouges (Marcos Montes) portant une ceinture à la Joséphine Baker pour laquelle des poissons dorés du pêcheur remplacent les bananes, appariement du carnaval et du cabaret interlope pour signifier celui du christianisme et de l'homosexualité, Alfredo Arias entouré de ses fidèles excellentissimes dans le délire pince-sans-rire, campe magistralement - et avec jubilation - un sublime Pape baudruche phagocyté par l'image papale. |