Ça commence au loin, quelques cordes murmurent des notes, on tend l’oreille, ça se rapproche, quatre sons, quatre vibrations répondent au silence. Puis une voix, la voix de Feu Robertson annonce les invités, un silence, la voix s’élève, les cordes vibrent plus fort, elles oscillent et ondulent. Et ça s’arrête. Une urgence remonte l’échine, les cordes reprennent leur dialogue délicieux.
Tremblez tyrans, le troisième album de Feu Robertson, entourloupe les sens dès le premier morceau. Enregistré comme on respire, le précieux passe du blues au rock comme on valse sur un parquet glissant, naturellement et avec grande fluidité.
Composé de Charlemagne Ganashine (guitare, chant), Hallow Callow (guitare, banjo), Jean Phalempyn (basse, percussions) et The Golden Dalaï (clavier, piano), les quatre compères créent de la musique "hipnoise et freepy". En langage mortel, ils seraient une dérive des continents décomplexée en apesanteur dans de la mousse d’huile de monoï à la coconut bleue (et sans gluten très chère).
Envoûtant et frissonnant, l’album est un aller simple dans l’apaisante brume matinale, vous savez, celle qui semble être coincée entre deux conifères caduques et qu’on regarde comme un mouton capricieux échappé du troupeau. Feu Robertson en est, de ces moutons échappés du troupeau, il calque les genres les uns sur les autres pour créer une musique aérienne et sauvage. Il ne ressemble à personne et trace son chemin avec assurance. Et on le suit. De plein gré.
Stupéfiant parfaitement légal, à consommer sans modération (sur un parquet glissant c’est encore mieux), Tremblez tyrans est hypnotique et détaché de l’hymne dont il s’inspire : La Marseillaise. Chant de guerre suprême vantant les sillons sanguinolents et les marches conquérantes, Feu Robertson désacralise le mythe pour le transformer en un puissant élan superbe de grâce et de désintéressement.
De la mélancolie hallucinogène en huit titres, délicat et élégant, l’album incarne les déhanchements détendus d’un félin en vadrouille, persuadé que le monde est à ses pieds, prêt à se rouler sur le dos pour réclamer des gratouilles (ou des croquettes). Charmant.
# 13 octobre 2024 : Sur un malentendu ca peut marcher
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