Debussy : Préludes II
(Deutsche Grammophon) février 2018
Vingt ans après avoir enregistré le premier recueil de Préludes de Claude Debussy, Maurizio Pollini lui rend à nouveau hommage avec l’enregistrement du deuxième livre de Préludes pour célébrer le centenaire de la mort de ce compositeur français qu’il affectionne particulièrement.
Ce magnifique pianiste de 76 ans a mis en avant une grande partie du répertoire des grands compositeurs romantiques (Chopin, Schumann, Brahms…) et a terminé en 2015 d’enregistrer l’intégrale des sonates pour piano de Beethoven. La musique du XXe siècle ne sera cependant pas exclu de son répertoire et loin de là. Claude Debussy est pour lui une "curiosité intellectuelle" et un moyen de mettre en avant "une gamme infinie de couleur et de texture". C’est précisément ce que l’on ressent en écoutant cette succession de douze préludes aux caractères extrêmement variés et tous mis en valeur avec une précision technique et une recherche d’interprétation juste.
Nous sommes, avec cette succession de 12 préludes, dans l’oeuvre dite de maturité de Claude Debussy, mais aussi dans sa période que l’on peut qualifier d’impressionniste : "Je voulais à la musique une liberté qu’elle contient peut-être plus que n’importe quel art, n’étant pas bornée à une reproduction plus ou moins exacte de la nature, mais aux correspondances mystérieuses entre la Nature et l’Imagination". Les préludes sont pour lui le sommet de sa démarche.
Maurizio Pollini nous plonge sans difficulté dans ces différentes ambiances passant d’un climat féérique et mineral ("Les fées sont d’exquises danseuses" ; "Ondine") à une musique pleine d’humour ("Général Lavine - Eccentric" ; "Hommage à Samuel Pickwick Esq. P.P.M.P.C") ; d’une musique calme et tranquille ("Feuilles mortes" ; "Canope") à une atmosphère totalement dépaysante avec "La Pierta Del Vino" et son rythme de Habanera ; terminant par le tonitruant "Feux d’artifice".
La recherche technique, l’utilisation du pentatonisme et de la polytonalité sont mis en valeur par ce pianiste d’exception qui nous plonge dans le monde de Debussy sans nous laisser indemne.
Ce disque se termine par une oeuvre chère à Claude Debussy, En blanc et noir, pour deux pianos, que Maurizio Pollini interprète avec son fils Daniele. Ce premier enregistrement père et fils marque les premiers pas de Daniele vers le label Deutsche Grammophon.
Cette oeuvre a été composée durant la Grande Guerre. Debussy met un point d’honneur à se distinguer des envahisseurs allemands en signant les oeuvres de cette période du titre de "musicien français". En blanc et noir est une pièce en trois mouvements, chacun dédié à un personnage important de la musique : Serge Koussewitsky (grand chef d’orchestre de l’époque), Jacques Charlot (neveu de son éditeur Jacques Durand, mort au combat) et son ami et compositeur Igor Stravinsky. Des contrastes de nuances, de techniques avec des alternances de passages virtuoses, de chorals calmes et sombres, de ruptures créant des surprises mais aussi une sorte de malaise sont relayés avec brio par ces deux pianistes mettant en avant toutes les craintes, la tristesse et la rage de Claude Debussy pour cette guerre dont il ne connaîtra malheureusement pas l’issue.
Cet enregistrement est un petit bijou qui va ravir les amoureux de Claude Debussy, mais aussi les admirateurs de Maurizio Pollini, qui fait un brillant hommage à ce compositeur décédé il y a bientôt 100 ans.
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