Les plus téméraires d’entre nous ont l’audace de comparer Daniel Blumberg à une tripotée d’artistes plus élégiaques les uns que les autres. Bravo à eux, tant il ne ressemble à personne et à tant de monde à la fois. Ce premier album en solo voit le jour après moult tribulations musicales, il est donc le fruit d’un long chemin, et autant vous prévenir, Minus est loin d’être anodin.
A première vue, des pianos jouent l’émotion d’une atmosphère feutrée, des petits pas sur la moquette et des gestes mesurés, de la douceur. Et puis le piano se déglingue et déverse ses entrailles fumantes sur le parquet ciré et les souliers lustrés. Scandalous.
Il y a ces tentatives ahurissantes d’accoucher les grincements en mélodies, tel le mister Hyde combattant le Jekill inside, les sonorités frôlant dépassant parfois l’entendement logique de la mélodie. Et puis on s’immisce dans la tête de l’artiste, les acoustiques saturés de distorsions sataniques et l’âme en convulsion totale.
L’âme à vif, Daniel Blumberg puise dans ses démons familiers l’encre de ses titres. C’est torturé qu’il faut l’imaginer, aux abords d’une contrée fleurant le musc et la faucheuse. L’artiste termine ce qu’il commence, quand les vocalises montent, elles vont se briser sur les lames des cristaux trop fragiles pour les supporter et explosent en une myriade de petits éclats reflétant la lumière.
C’est ainsi que chaque instrument est poussé à son ultime souffle, Daniel Blumberg les torture jusqu’à leur briser les os, à la limite du supportable pour les mélodistes immatures que nous sommes, n’est-ce pas. Et c’est exactement dans ces dépassements que Minus est fondamentalement attachant, parce qu’il résonne à l’intérieur de nos propres expériences, précisément quand notre souffle s’est heurté à la fin de ses capacités, jusqu’au bout.
Daniel Blumberg joue et chante avec talent les limites ultimes du champ des possibles, c’est en musique qu’il déroule les histoires de nos sentiments jusqu’à la déchirure. Il dérange et bouleverse à la fois, il est l’expérience ultime de la vie après la mort.
Un titre en hommage à Shane McGowan disparu cette semaine après avoir vécu une vie comme s'il n'en avait qu'une et il avait sans doute bien raison. Et puis c'est bientôt noel, le temps des cadeaux alors voici notre sélection hebdomadaire.