"J’écris les travées et les silences, ce que l’on ne voit pas, ce que l’on n’entend pas. J’écris les chemins que l’on évite et ceux que l’on a oubliés. J’étreins les Autres, ceux dont l’histoire se propage dans la mienne, comme le courant d’eau douce qui se déverse dans la mer. Je fais parler des fantômes pour qu’ils cessent de me hanter. J’écris parce que ma mère tenait ses livres contre sa poitrine comme s’ils avaient été des enfants." Nina Bouraoui, 2018
Nouveau livre pour Nina Bouraoui, auteur d’un très grand nombre de livres, ayant déjà reçu de nombreux prix littéraires dont le Renaudot en 2005 avec Mes mauvaises pensées. Avec Tous les hommes désirent naturellement savoir, livre dédié à ses parents publié chez JC Lattès, Nina Bouraoui nous propose un roman envoûtant sur les origines du désir et de la violence. La première page du livre nous apprend l’origine du titre de l’ouvrage, tiré de La métaphysique d’Aristote.
Pour ce faire, l’auteure a fait le choix de construire son livre autour de courts chapitres, ne dépassant pas quatre ou cinq pages et ayant pour titre soit "savoir", "se souvenir", "devenir" et "être" en fin de livre. Nina Bouraoui nous parle d’elle, de sa vie depuis son enfance sur deux territoires, la France et l’Algérie.
Le livre traite aussi fortement des questions d’identités, de celles que cherche l’auteure au travers de sa nationalité et de sa sexualité. Fille d’un Algérien et d’une bretonne, elle nous raconte les difficultés qu’elle a pu rencontrer pour se sentir à l’aise aussi bien en France et en Algérie. Son homosexualité, dont elle nous parle aussi dans le livre, sera aussi source de difficultés, notamment dans son acceptation, dans le regard des autres et sa difficulté à l’assumer. C’est à Paris, dans les boîtes pour filles qu’elle va découvrir son attirance pour les femmes, en rencontrant Julia.
Construit autour de souvenirs qu’elle nous raconte, Nina Bouraoui fait donc défiler sa vie au travers des nuits de sa jeunesse, de ses errances, de ses alliances et de ses déchirements. Elle nous dresse l’histoire de son désir qui est devenu une identité et un combat. Elle nous raconte aussi son histoire fusionnelle avec sa maman et parle aussi souvent de ses grand-parents.
Elle nous promène entre deux pays, à l’histoire contrariée, mêlant ses petites histoires à la grande Histoire, notamment autour des violences qui touchent l’Algérie dans les années 90. De très belles et nombreuses pages concernent l’Algérie et l’on ressent parfaitement les sentiments de l’auteure à l’égard de ce pays.
Tous les hommes désirent naturellement savoir est donc un très beau livre superbement écrit, un récit intime et pudique que l’on prend plaisir à lire pour mieux comprendre les déambulations d’une jeune adolescente en quête d’identité au cours d’une époque pas si lointaine. |