Une bande de moines endimanchés, capuches rabattues sur la face, s’avance dans la brume. De l’ovale sombre de leurs visages indistincts s’élève une plainte. Entre envoûtement et complainte d’agonie, le nouvel album de San Carol s’ouvre sur "Meaning of life", mystérieux et terriblement addictif.

Il est Maxime Dobosz dans la vie et San Carol sur la scène. Houdini est son troisième album, neuf titres de musique éthérée, d’insaisissables mélodies étrangement familières. Et cool. Les guitares sonnent comme des synthés et les rythmes se démultiplient à la manière de cercles concentriques s’évasant en corolle sur les ondes. Un pont entre la pop et la musique expérimentale.

Entouré de Florent Vincelot à la basse, Simon Garnier aux percussions et Stw aux guitares, San Carol surfe sur les embruns de la pop et de ses refrains aguicheurs. Peu de paroles, les sons se suffisent à eux-mêmes, quelques textes en anglais glissent tels des dirigeables dans un ciel nocturne, loupiotes de sécurité de bâbord à tribord, un souffle au-dessus de nos têtes.

Joyeusement tricotés par les agiles tisserands de l’album, les morceaux s’embrasent sur eux-mêmes, les coins se racornissent lentement et rejoignent le cœur d’Houdini, laissant le simple mortel pantois, les bras ballants inutiles et le cœur chahuté par les vibrations palpitantes se faisant écho d’un ventricule à l’autre.

Chant vaudou, les voyelles allongées comme les larmes sur ma manche, l’émotion est pure, les sentiments ne sont pas feints, San Carol ne plaisante pas avec les perceptions "I’m running out of time… Don’t be afraid… Don’t be ashamed" ("Turn to dust").

L’album touche le centre vital de la musique, pop et électro, ambiance gin-vodka et chasse à la loutre. A consommer sans modération en sirotant de la pinède en bouteille. Vous finirez en larmes, recroquevillé sous la couette, avec une furieuse envie de nourriture régressive et de câlins.