On ne remerciera jamais assez le label Hannibal d'avoir ressorti ce mythique concert de Robert Wyatt au Royal Theatre de Drury lane à Londres, car ce dernier a longtemps été un objet de convoitise dont les enregistrements pirates ne se comptent plus…
Il faut dire qu'à l'époque, le père Wyatt revenait de très loin. Un peu plus d'un an auparavant, alors qu'il était au beau milieu de l'enregistrement du troisième album de son groupe Matching mole, il se jetait d'une fenêtre au beau milieu d'une soirée passablement arrosée…Résultat : six mois d'hôpital et une paralysie des deux jambes… Certes, ça aurait pu être pire, mais imaginez le traumatisme pour ce garçon percussionniste de jazz…
Paradoxalement, cet accident ne va pas altérer le soif de création de l'anglais, qui profitera de sa convalescence pour composer l'inusable Rock Bottom, qui reste pour beaucoup de jeunes artistes, un disque indémodable et une indéfectible pierre angulaire de la musique moderne…
L'influence de ce disque sur Radiohead, Talk Talk et tout un pan du post rock est plus qu'évidente. Cet enregistrement retrace donc la "rentrée" si l'on peut dire de Wyatt à Londres. La liste d'invités est copieuse et le casting est alléchant : le guitariste avant-gardiste Fred Frith, le saxophoniste Gary Windo, le trompettiste sud-africain Mongezi Feza, le claviériste Dave Stewart, pas le poussif guitariste de "Gymnastique rythmique et sportive" (Eurythmics en anglais) et même le soporifique Mike Oldfield (Tubular Bells).
Pendant ce concert, Wyatt en profitera pour rejouer des morceaux de Matching Mole ainsi que de vieux titres de son premier groupe, Soft Machine. Ces morceaux oscillent entre rock progressif et digressions jazzy avant-gardistes et longues plages planantes et oniriques.
Mais le bonhomme enchaîne surtout l'intégralité de Rock Bottom, avec des versions saisissantes de "Alife" et de "Alifib". L'incroyable "Mind Of a Child" chantée par une voix féminine file limite des frissons et préfigure les morceaux de bravoure instrumentaux de groupes tels que Talk Talk ou… Labradford. Wyatt se fendra aussi d'une impeccable reprise du "I'm A Believer", chanson qui fut originellement composée par Neil Diamond pour les Monkees.
Ce disque ne constitue peut être pas la meilleure introduction pour les novices désireux de découvrir l'univers légèrement déjanté, poétique et onirique de ce compositeur anglais atypique.
Pour les fans de Wyatt, elle doit bien sûr rejoindre illico les autres œuvres du maître dans le range cd Ikea déjà plein à craquer !!!!
|