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puce Fernand Khnopff - Le Maître de l'énigme
Petit Palais  (Paris)  Du 11 décembre 2018 au 17 mars 2019

Le Petit Palais présente, en collaboration avec les Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, une exposition monographique consacrée au peintre, dessinateur, graveur et sculpteur Fernand Khnopff et figure majeure du symbolisme belge.

Les commissaires Michel Draguet, directeur des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, Christophe Leribault et Dominique Morel, respectivement directeur et conservateur général au Petit Palais, ont sélectionné près de 150 pièces emblématiques pour esquisser un panorama significatif de son oeuvre qu'ils proposent sous le titre "Fernand Khnopff - Le Maître de l'énigme".

Ordonné de façon chrono-thématique, le parcours se déploie dans une judicieuse scénogaphie de Cécile Degos qui décline, notamment avec sa trilogie chromatique bleu-noir-blanc, les codes décoratifs de l'étonnante maison-atelier-sanctuaire de Fernand Khnopff.

Fernand Khnopff, déjouer le principe de réalité

L'oeuvre de Fernand Khnopff, passeur entre la tradition des primitifs flamands et l'avant-garde surréaliste, co-fondateur du Cercle des XX et peintre à la notoriété internationale en son temps, s'inscrit dans le mouvement du symbolisme tel que défini comme "un sublimé de perceptions et de sensations*" qui "n'est pas insensible à l'appel du mysticisme dans sa veine ésotérique, occultiste et maçonnique*" et constitue "la plus haute expression d'art et le plus spiritualiste*".

Effectivement elle s'avère en adéquation avec le symbolisme qui, entre le fantastique romantique et le merveilleux surréaliste, et dans une époque paradoxale connaissant simultanément l'émergence de la science positive, le développement des sciences occultes et la naissance de la pyschanalyse, repose sur une esthétique de la rupture avec le principe de réalité.

"Fuir la nature, refuser autant que possible les lois biologiques de l’espèce, se tenir à l'écart de la société...*" implique la rupture avec le réel, car la réalité visible n'est que trompeuse apparence, avec le présent, empreint du "soleil noir de la mélancolie" selon l'analyse de l'historien d'art et conservateur général du patrimoine Jean Clair, et avec la modernité, sous emprise d'une rationalité scientifique menant au pessimisme.

Et y substituer la quête métaphysique de l'essence des choses et la plongée dans les limbes de l'inconscient - en cultivant le rêve et l'imaginaire décadent stimulé notamment par le simulacre - pour créer "un réel à soi", un univers dans lequel président l'étrangeté et l'ambiguïté ,et un avenir inscrit dans le passé.

Chez Khnopff, le culte onirique est placé sous l'égide de Hypnos, le dieu du sommeil représenté comme un visage ailé par le sculpteur grec Scopas, qui devient une de ses figures récurrentes à titre principal ("Une aile bleue", "Blanc, noir et or") ou instillée sous forme d'une petite alie bleu dans ses tableaux "cryptés" tels "I Lock My Door Upon Myself" et "Who shall deliver me ?" dont les titres renvoient à ceux de poèmes de Christina Rossetti, la soeur du peintre pré-raphaélite.

Fernand Khnopff opère la rupture avec la réalité dans la peinture de paysage, conçue sur le modèle whislérien à effet de brouillard avec une palette chromatique de tons délavés, qui ne vise pas à la captation de la nature mais à sa sublimation mnésique comme reflet du paysage mental de son auteur, son introversion et son solipcisme, la devise de Khnopff étant "On n'a que soi" et son ex-libris "Mihi(Moi)". Tel est le cas des paysages d'enfance des années 1880-90.

Comme ceux de Bruges des années 1904-1905, ville d'élection, la Bruges-la-morte anthropomorphéisée du romancier Georges Rodenbach, qui se révèle de manière fantomatique et renvoie à l'âge d'or de la cité flamande du temps de Hans Memling, peintre primitif flamand qui figure au panthéon pictural khnopffien.

Rupture avec le réel également dans le genre du portrait. Portraitiste attitré de la haute société bruxelloise, Khnopff a commencé par peindre ses proches, dont deux figures majeures et signifiantes dont certains analysent le tropisme comme une recomposition féminine de la Trinité chrétienne autour du Fils artiste avec une déesse-mère et une amante spiritualisée.

Ces figures sont celles de sa mère et de sa soeur Marguerite figées dans une représentation théâtralisée identique et dans un cadre aussi fermé qu'indéterminé avec une robe stricte dépouillée de tout ornement ou fantaisie et une occultation de la chair ne laissant apparaître du corps, au mieux, le visage et les mains.

La figure maternelle est celle d'une mère en noir, solitaire, esthète ( ("En écoutant Schumann") et austère ("Portrait de Madame Edmond Khnopff" 1882) pour laquelle Fernand Khnopff éprouve un respect dévoué et un amour infini.

De même, et de manière qui laisse accroire à un amour incestueux, pour sa soeur Marguerite, modèle, muse, égérie, érigée en archétype idéal et idéalisé de la femme vertueuse, vestale séraphique et vierge inaccessible, en tout état de cause interdite, sur laquelle il calque le portrait d'autres jeunes femmes ("Portrait de Marguerite Landyut", "Portrait de Madeleine Mabille").

Silhouette longiligne toujours vêtue de blanc, couleur de l’innocence, de la pureté et de la chasteté, dans une tenue dépourvue de tout ornement ne laissant découvertes que les mains et le visage, et regard détourné à l'interprétation polysémique, de la simple pudeur à la dissimulation d'un sentiment secret.

De nouveau se retrouvent l'influence whistlérienne et son expérience du blanc sur blanc avec ses Symphonies en blanc des années 1860 mais la différence tient au regard frontal de ces femmes représentées comme une allégorie de l'innocence avec une résonance mariale.

Les deux conduisent à une impasse du désir qui se modifie avec les deux événements - le mariage de l'une et le décès de l'autre - mettant le masculin à l'épreuve de la réalité de l'obscur objet du désir avec l'approche fantasmatique du corps érotique d'une femme charnelle, séductrice, tentatrice et destructrice pour laquelle Khnpff recourt à la translation mythologique.

Ainsi, la figure maternelle est revue à l'aune de la mère archaïque, des divinités primordiales telle la dévorante Méduse, et du mythe d'Oedipe avec le célèbre tableau "L'Art - Des caresses" et son étrange couple mimétique avec une tendre sphinge à corps de guépard qui reprend, dans une approche différente, l'iconographie symboliste telle que traitée à plusieurs reprises par de Gustave Moreau dont "Oedipe et le Sphinx".

L'influence de Gustave Moreau, chef de file du symbolisme décadent, son aîné comme lui dandy** et profondément attaché à sa mère, s'avère patente. Ainsi, par exemple, "La Tentation de Saint Antoine" de Khnopff entre en résonance avec "L'Apparition" de Moreau.

Ce tableau dans lequel le diable se fait femme pour tenter l'apôtre dans sa chair et l'entraîner dans la chute, porte le thème de prédiclection du symbolisme celui de la femme fatale, source ambivalente d'attirance et de répulsion qui taraude Khnopff et traduit dans son triptyque inspiré de la pièce "La Reine des Fées" de Edmond Spenser, avec "Solitude" encadrée de "Acrasia", la débauche, et "Britomart", la chasteté.

Pour la femme fatale, femme idole, cruelle et destructrice, Khnopff décline le visage stérotype codifié par les peintres pré-raphaélites, chevelure rousse et machoire carrée, qui devient un masque propice au simulacre, tel "Le Masque au rideau noir" repris pour l'affiche, et qui introduit le deuxième thème symboliste, celui polysémique de l'androgynéité.

Ce qui correspond à la rupture non seulement avec les codes sociaux mais identitaires, en permettant tant le dépassement de la sexuation que la fusion des contraires que le fantasme d'un troisième genre idéalisé qui renvoie à d'ancestrales représentations théogoniques et/ou cosmogoniques.

La monstration incite à d'autres apparentements tels l'influence réciproque de la Sécession viennoise avec des compositions à la Klimt et l'emploi de rehauts dorés.

Elle met également l'accent sur l'utilisation de la photographie par Fernand Khnopff comme outil de création d'une part, en reprenant la théorie du dessin photogénique, et d'autre part, pour illustrer la trahison des qui sera développée par le surréalisme. Sur ce deuxième aspect, la monstration présente une animation graphique autour du monumental pastel "Memories" représentant Marguerite Khnopff déclinée en septet .

Ne pas rater la mise en résonance avec l'oeuvre d'artistes contemporains, tels le "Peacock Vanitas" du plasticien belge Hans Op de Beeck qui use d'un rappel avec le paon qui ornait le seuil de la maison de Khnopff, ou "Ladock Abbey" vue par le photographe jaonais Hiroshi Sugimoto.

A noter également, outre la salle convertie en salon symboliste pour une pause érudite entre livres, photographies et animations littéraires, théâtrales et musicales, l'inventif dispositif de médiation qui comprend quatre stèles audio-olfactives offrant des bulles immersives dans l'eouvre de Khnopff en résonance avec les arts de son temps.

 

* Emile Verhaeven
** Emile Verthaeven décrit Fernand Khnopff comme "un clergyman devenu dandy dont la vie est une claustration perpétuelle"

En savoir plus :

Le site officiel du Petit Palais

Crédits photos : MM
avec l'aimable autorisation du Petit Palais


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# 24 mars 2024 : Enfin le printemps !

Le printemps, les giboulées de mars, les balades au soleil ... la vie presque parfaite s'il n'y avait pas tant de méchants qui font la guerre. Pour se détendre, cultivons nous !. Ajoutons à cela nos chaines Youtube et Twitch et la semaine sera bien remplie.

Du côté de la musique:

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"Belluaires" de Ecr.Linf
"Queenside Castle" de Iamverydumb
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"Invincible shield" de Judas Priest
"All is dust" de Karkara
"Jeu" de Louise Jallu
"Berg, Brahms, Schumann, Poulenc" de Michel Portal & Michel Dalberto
quelques clips avec Bad Juice, Watertank, Intrusive Thoughts, The Darts, Mélys

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"Dragging bodies to the fall" de Junon
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"Cavalières" au Théâtre de la Colline
"Painkiller" au Théâtre de la Colline
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"Laissez-moi" de Maxime Rappaz
"Le jeu de la Reine" de Karim Ainouz

"El Bola" de Achero Manas qui ressort en salle

"Blue giant" de Yuzuru Tachikawa
"Alice (1988)" de Jan Svankmajer
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Lecture avec :

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"Mirror bay" de Catriona Ward
"Le masque de Dimitrios" de Eric Ambler
"La vie précieuse" de Yrsa Daley-Ward
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