"Le culte des valeurs spirituelles est à la base de toute société qui se prétend civilisée, et la Musique, parmi les arts, en est l'expression la plus sensible et la plus élevée." Albert Roussel, 1936
2019 marque deux 150ème anniversaires. Celui de la mort de Berlioz et celui de la naissance d’Albert Roussel. Deux anniversaires, deux trajectoires différentes mais deux raisons de se plonger dans le corpus d’œuvres de deux compositeurs n’ayant pas une reconnaissance méritée. Erato crée l’évènement en éditant pour la première fois un splendide coffret de 11 CD regroupant les œuvres d’Albert Roussel.
Albert Roussel est l’un des compositeurs majeurs de la musique française du XXe siècle touchant à tous les genres et le plus grand symphoniste Français de son temps, la Symphonie n°3 étant sûrement son chef-d’œuvre.
Issu d'une famille de la grande bourgeoisie, Albert Roussel né à Tourcoing le 5 avril 1869. Il est encore jeune quand ses parents décèdent. Il est alors recueilli par son grand-père, Charles Roussel-Defontaine, maire de Tourcoing. A la mort de ce dernier, c’est son oncle qui s’occupera de lui. En 1887, après avoir eu son baccalauréat, il est admis à l’École Navale.
En 1889, il est sur L'Iphigénie vaisseau-école, pour un voyage de neuf mois des côtes portugaises, d'Afrique du Nord jusqu'aux Antilles. Il travaille l’harmonie alors qu’il est en 1892 sur la Dévastation mais c’est sur La Melpomène qu’il commence vraiment à se révéler musicalement commençant à composer, accompagnant les messes au piano et montant avec des officiers La mascotte, opérette d'Edmond Audran.
Il démissionne, à cause d’une santé fragile, en octobre 1894 à seulement 25 ans et se consacre à la musique. De retour dans sa famille à Roubaix, il décide de suivre des cours d’harmonie avec Julien Koszul (grand-père d’Henry Dutilleux et directeur de l’École nationale de musique de la ville) puis monte à Paris où il apprend le piano, l'orgue, l'harmonie, le contrepoint et la fugue avec l’organiste Eugène Gigout.
En 1898, il entre à la Schola Cantorum, où il étudiera jusqu’en 1908, notamment les cours d’orchestration avec Vincent D’Indy. De D’Indy, Roussel apprend les formes, les architectures sonores, l’équilibre harmonique. Un apprentissage qu’il ne cessera de confronter à une imagination, à des aspirations impressionnistes. En 1902, il devient professeur de contrepoint avec parmi ses élèves des compositeurs comme Erik Satie, Edgard Varèse, Paul Le Flem ou encore Roland-Manuel...
C’est à cette époque qu’il compose le prélude symphonique Résurrection et sa première symphonie. En 1912-1913, il compose Le festin de l'araignée, d’abord ballet, bientôt suite symphonique, qui est couronné de succès. Réformé de la marine, il participe à la Première Guerre mondiale en tant qu’ambulancier. En 1918, il s'installe à Perros-Guirec et termine Padmâvati (et ses couleurs à la Delibes). A partir de 1920, il s’installe à Varengeville en Normandie pour se consacrer à la composition.
Au cours de cette dernière période de sa vie, il y compose le ballet Bacchus et Ariane ses 3ème et 4ème Symphonie, la Suite en fa, la Sinfonietta... Son écriture, sa sonorité unique, singulière, anticonformiste presque, une palette impressionnante de couleurs (un exotisme tiré de ses voyages), de sensations, de dynamiques, d’évocations, une finesse dans le travail des climats lui rapportent une reconnaissance internationale. En 1930, il assiste à Boston à la création de sa 3e Symphonie par Serge Koussevitzky. Il meurt le 23 août 1937 à Royan, où il était parti se reposer suite à une crise cardiaque et est enterré dans le cimetière de Varengeville face à cette mer qu'il aimait tant et qui ne le quitta jamais.
Albert Roussel a créé une musique pleine de diversité, d’imagination, qui embrasse les couleurs de l’impressionnisme, entre contemplation, rigueur d’écriture et modernisme. Une dualité entre éléments constructifs et éléments expressifs, quelque part comme tiraillé entre D’Indy et Debussy.
On retrouve ici les plus grands artistes du catalogue Erato (Munch, Martinon, Plasson, Cluytens, Doyen, Mesplé, van Dam, Quatuor Via Nova…) mais surtout des versions de référence (Le festin de l’araignée, Bacchus et Ariane par Jean Martinon et l’orchestre national de l’O.R.T.F., Les Evocations par Michel Plasson et l’Orchestre National du Capitole de Toulouse, la symphonie n°1 "le poème de la forêt" par Charles Dutoit et l’Orchestre National de France, la symphonie n°3 sous la direction de C. Munch avec l’Orchestre des Concerts Lamoureux, l’Impromptu pour harpe avec Lily Laskine...). Un coffret absolument essentiel, tout simplement ! |