"Dead On arrival" (DOA) est le pseudo d’un écrivain secret, si ça se trouve, c’est mon voisin, ou le vôtre. Non ? Si ! Et Stéphane Douay alors ? Créateur de la maison d’édition Pirates, il manie bien le crayon et Galopin maîtrise bien les couleurs. Ensemble, ils adaptent un roman de DOA La ligne de sang au rang du roman graphique.
Premières planches sombres, la nuit, la pluie, le ciel gronde des éclats lumineux, la boue, une femme, un homme "- C’est là ! On devrait quand même attendre les gendarmes. – Plus le temps. Première connerie… - Prête ? Prête ! […] – tu restes ici et tu chouffes mes arrières. Deuxième connerie". Ils sont tendus tous les deux là, on entend leur pouls saccadé monter dans leur gorge, un coup d’adrénaline, une urgence, une pression, ça sent le truc qui va foirer grave dans pas longtemps ça.
Un mois plus tôt, le même gars, Marc Launay rejoint Priscille Mer (la femme) pour gérer un (a priori) banal accident de la route, "Un motard qui a pris l’épingle un peu large, il a tapé la bagnole qui montait. Fort." de la tôle écrasée, du gras de moteur partout, un motard en neuro. Accident qui se termine habituellement chez les assurances qui nominent les véhicules épave, un ou deux retraits de permis voire un séjour à l’hôpital. Mais là, non, c’est DOA qui écrit quand même, faut pas déconner.
L’accidenté est un certain Paul Grieux, qui vit chez une certaine Madeleine Castinet. Le capitaine de police se doit d’aller prévenir la dame, il s’en va donc fissa chez la belle, et ça se complique. Sa porte est béante, l’appartement d’une propreté à en faire rougir Monsieur Propre, sauf une pièce qui pue la mouise et bien pire encore. Une enquête est ouverte, elle les mènera dans un cauchemar à ciel ouvert.
Le roman est rythmé d’allers-retours entre la scène du dénouement et l’avancée des investigations, elle-même entrecoupée de voyages dans le passé trouble du blessé. Sans palabres descriptives qui pourraient être ennuyeuses dans ce type d’ouvrage, les moments sont identifiables par leurs identités graphiques, les coloris ont des tons différents, le trait est plus fort, plus rapide sur la scène du dénouement.
L’univers est glacial, DOA et Douay offrent un polar glauque à souhait dans la boue et le stupre, aux confins de la morale, à la lisière du diabolique titillant le fantastique du bout de la plume. L’intrigue est rondement menée, l’ambiance est un ciel chargé d’électricité, on se demande à chaque minute à quel moment ça va craquer, et quand ça craque, et bien ça faisait un moment qu’on était dans la tempête jusqu’au cou. |