Rentrée littéraire chez les éditions Buchet-Chastel qui nous proposent comme d’habitude de formidables romans venus d’horizons divers. Côté littérature étrangère, la maison d’édition a fait le choix de publier un ouvrage remarquable tout droit venu d’un pays africain qui nous propose de plus en plus des ouvrages passionnants. Nous avons eu l’occasion l’an dernier de lire des ouvrages nigérians qui étaient à chaque fois d’agréables surprises.
L’auteur, Chigozie Obioma, n’est pas un inconnu de ceux qui s’intéressent à la littérature africaine. Né au Nigéria en 1986, il vit désormais aux Etats-Unis où il enseigne le Creative writing à l’université de Nebrasa-Lincoln. Son premier roman, Les pêcheurs, paru en 2016, finaliste du Booker Prize, lui valut une reconnaissance mondiale. La prière des oiseaux, son deuxième roman qui vient tout juste de paraîitre, a lui aussi figuré dans la "short list" du prestigieux prix et a été traduit dans douze pays. Il est le premier à paraître aux éditions Buchet-Chastel.
L’histoire de ce second roman se déroule évidemment au Nigéria autour d’un personnage lumineux, un certain Chinonso, éleveur de volaille. Un jour, ce dernier aperçoit sur sa route une jeune femme sur le point de se jeter d’un pont. Terrifié, Chinonso la rejoint et jette deux de ses plus précieux poulets dans les eaux en contrebas.
Touchée par son sacrifice, la femme, Ndali, renonce à son geste. Cet épisode va les lier indéfectiblement, et ils vont tomber amoureux l’un de l’autre. Mais Ndali vient d’une riche famille qui s’opposera à leur union.
Pour les conquérir et garder son amour, Chinonso vend tous ses biens et part poursuivre ses études dans une petite université, à Chypre. Une fois sur place, il déchantera vite, furieux contre un monde qui tente de le maintenir toujours aux marges. Chinonso voit peu à peu ses rêves, Ndali, et son foyer s’éloigner.
En faisant le choix d’utiliser un registre qui n’est pas sans nous rappeler les grandes épopées et les grandes tragédies grecques, le tout imprégné de la culture Igbo nigériane (l’une des principales ethnies du pays), l’auteur nous offre une bouleversante réflexion sur la question du destin et la possibilité d’y échapper.
Cette prière des oiseaux est un roman foisonnant, une ode à tous les déshérités, racontée par un narrateur centenaire, appelé "le Chi", l’esprit et l’ange gardien du Nonso, l’éleveur de volaille. Vous l’avez donc compris, l’ouvrage est construit autour de deux univers, celui de l’esprit, ou plutôt des esprits, qui foisonnent dans la culture nigériane et celui des humains. On a alors d’un côté la sagesse de l’ancien, le Chi, et l’insouciance du jeune éleveur de volaille. L’esprit et la sagesse sont là pour veiller sur le plus jeune, le guider et le conseiller dans ses expériences et ses choix.
Les deux nous immergent dans cette culture nigériane incroyable. La quête d’amour qu’on nous conte nous sort aussi du Nigéria, nous emmenant vers Chypre, nous montrant le destin incroyable de Chinonso fait de petits bonheurs, d’amour et d’espoir mais aussi de déconvenues, de tristesse, de désolation et de trahison.
Alors voilà, si vous aimez les lectures qui sortent de l’ordinaire, si votre curiosité pour les civilisations africaines et leur culture existe, alors ce magnifique ouvrage nigérian est fait pour vous et ne vous décevra pas. Vous entrerez dans un univers sublime, fait de belles lettres qui prouvent que la littérature africaine n’a rien à envier à sa conjointe européenne.
Chigozie Obioma est un très grand auteur, son deuxième ouvrage, La prière des oiseaux est une petite pépite, un ouvrage d’une rare puissance, superbement écrit, totalement envoûtant qui offre au lecteur une quête bouleversante que l’on n’est pas prêt d’oublier. |