Spectacle conçu d'après l'essai éponyme de Diderot, mise en scène de Patrick Rouzaud, avec Mahmoud Ktari et Grégoire-Gabriel Vanrobays.
Davantage qu'une adaptation pour la scène, Mahmoud Ktari propose une transposition du célèbre - et fameux - essai "Le Paradoxe sur le comédien" de Denis Diderot sur l'art du comédien. Ainsi il en conserve fort naturellement la forme, celle du discours philosophique qui se déploie en mode dialogué telle une conversation amicale d'avant souper, et la quasi-totalité du propos original cependant expurgé des digressions anedotiques et des références à des personnes et des faits de l'époque qui ne résonnent plus aux oreilles contemporaines. S'il opère quelques aménagements, ce n'est donc que pour mieux le servir et en clore la démonstration sur un cocasse clin d'oeil. Ainsi donne-t-il à entendre la dialectique diderotienne, entre autres, sur les controverses mimésis/diégésis, métier/art, grandiloquence/naturel, pénétration/sensibilité, la nature du jeu du comédien, imitation identification ou incarnation, la dissociation homme, comédien et personnage et sa définition du comédien comme "un grand pantin merveilleux". A la mise en scène, Patrick Rouzaud ne verse pas dans la discussion de salon en fauteuil club mais opte pour la fluidité et la parole en marchant en résonance avec la manière des philosophes de l'Antiquité. Ainsi, les interprètes officient-ils sur un plateau dépouillé, seuls un rideau transparent et deux chaises pour une scénographie en noir et blanc contrastée par les lumières de Michaël Baranoff. Mahmoud Ktari opère avec une parfaite éloquence pour délivrer l'argumentaire de Diderot non initialement destiné à l'oralisation théâtrale avec ses conséquentes réflexions, préceptes et jugements qui contribuent à éclairer le jugement du spectateur et aiguiser son discernement. S'avère tout aussi émérite la prestation de son partenaire Grégoire-Gabriel Vanrobays qui campe l'interlocuteur tour à tour dubitatif, questionneur et rêveur mais essentiellement dans l'écoute pour lequel, avec sa maîtrise de la dramaturgie non verbale, il délivre une remarquable prestation. |