"Helcio s’est alors souvenu de toutes les fois où le Manufatora avait perdu parce qu’ils avaient cru que la victoire était déjà acquise".

Librement inspirée de la vie de Marcello Quintanilha, Les lumières de Niterói est un roman graphique en forme de buddy story. Deux potes qui s’en vont escalader les embûches sur leur chemin de vie.

Brésil, années 50, baie de Rio de Janeiro. Entre la plage et le foot, Helcio et Noël foncent au large récupérer de l’or en barre. Un inconscient pêche à la dynamite et il serait dommage de ne pas profiter de cette récolte facile. Helcio plonge, Noël reste sur la barque, il compte les minutes, le temps est compté, la barque doit être rendue rapidement.

Helcio est beau, il joue au foot comme un dieu et il sent le sable chaud (mon légionaaiiiirrreee). Noël est difforme, il vend des boissons dans une échoppe et il baisse la tête tout le temps (Quasimoddooooo). Ensemble, ils essaient de revendre la marchandise sur une île de naturistes susceptibles, puis sur la place du marché de Paqueta. Sans succès. Alors que l’histoire aurait pu s’arrêter sur cet échec comme l’adrénaline s’essouffle quand on perd à la loterie, l’auteur fait rebondir l’aventure dans une tempête surgie de nulle part (à moins d’avoir écouté les anciens, mais les deux associés ont un timing, alors les anciens…).

Les planches floutées par la pluie, les propos assourdis sous les coups du tonnerre, l’auteur met les deux gars dans la galère, mais ils tiennent le bon bout, ils se motivent et se soutiennent comme le font les rares amis. C’est à ce moment que le récit bascule dans l’histoire. Tout se joue dans cette tempête. L’avenir d’Helcio, future recrue d’un club plus important et l’avenir de Noël, avorton pétochard.

La tempête des éléments réveille une tempête émotionnelle dans le cœur de ces deux jeunes protagonistes, à grands coups d’insultes entrecoupées de prières, ils se soutiennent à la mode macho des années 50, en criant fort sur leurs faiblesses et en serrant les poings.

Alors que ces deux-là ne semblaient être que des compères de fortune, une véritable amitié se dessine au fil des pages, une amitié masculine à tapes dans le dos et rires forcés pour cacher la sensiblerie. C’est touchant de puissance.

Le trait est net et les couleurs pleines, les croisements entre sections aquatiques et terrestres se font en toute légèreté, donnant une petite leçon de vie au lecteur, tout est lié… rien n’est jamais acquis. A part peut-être l’amitié de ces deux-là, qui se ressemblent bien plus qu’on ne le croit au premier regard.

"Il entrait dans l’eau… mais en même temps, ce n’était pas ça qu’Hélcio ressentait chaque fois qu’il plongeait, ce qu’il ressentait ce n’était pas qu’il entrait dans l’eau… mais plutôt qu’il sortait du monde"