A chaque rentrée littéraire, le lecteur assidu que je suis se doit de faire des choix en fonction des ouvrages que l’on me propose, de mes goûts, de mes finances aussi car j’achète de nombreux livres et du temps que j’ai. Avec plus de 510 titres qui vont sortir entre fin août et fin octobre, mes priorités vont donc vers les auteurs que j’aime particulièrement, les nouveaux écrivains que l’on me conseille sur des blogs ou sites internet que je consulte ou enfin les couvertures qui me font de l’œil ou m’interpellent. C’est ce qui s’est passé avec le dernier ouvrage de Brit Bennett, publié par les éditions Autrement dont je chronique volontiers leurs titres, une auteure que je ne connaissais pas encore.

Brit Bennett est diplômée de littérature à Stanford et fait partie des cinq meilleurs jeunes auteurs américains du National Book Award. Son premier roman, Le cœur battant de nos mères, succès critique et public, a remporté le prix Lire du meilleur premier roman étranger. Les critiques de son second ouvrage annonce déjà qu’il surclasse le premier. N’ayant pas lu ce premier ouvrage, je n’ai donc pas eu à les comparer, me contentant de savourer L’autre moitié de soi qui, vous vous en doutez, m’a donné l’envie d’aller lire son précédent, ce que je ferai évidemment une fois mes lectures de la rentrée littéraire terminées.

L’histoire débute en Louisiane, dans la petite bourgade de Mallard fondée par un homme noir qui a la peau claire désirant vivre aux côtés de personnes comme lui. A Mallard, la clarté de la peau est facilement mise en avant et les populations ont bien compris que moins on a l’air noir, plus la vie sera simple. Les habitants noirs s’échinent depuis des siècles à éclaircir leur couleur de peau par des mariages métissés.

Dans ce petit village naissent deux charmantes jumelles inséparables, Desiree et Stella, claires de peau. Quittant l’école à seize ans pour aller faire le ménage chez des familles blanches, les deux jeunes filles décident un jour de fuguer, de partir vers la Nouvelle Orléans où leurs chemins vont ensuite se séparer. Quatorze ans après leur fugue, l’une des deux jumelles réapparaît. Pourquoi est-elle revenue avec sa fille à la peau très noire dans cette communauté qu’elle a toujours voulu fuir ? Va-t-elle retrouver sa sœur, disparue sans laisser de trace pour mener une vie de blanche ?

L’ouvrage ne se limite pas à nous raconter l’histoire des deux jumelles puisque l’on suit aussi la destinée de leurs enfants, ce qui nous permet de suivre cette famille sur deux générations et de voir les univers différents dans lesquels elles vont grandir, d’autant plus qu’elles n’ont pas les mêmes couleurs de peau. Il est intéressant de voir l’évolution de ces deux jumelles, notamment celle de Stella que l’on retrouve plus loin dans l’ouvrage qui a décidé de vivre "comme une blanche", mariée à un riche blanc plein de sous. Son ascension sociale est passée par sa couleur de peau blanche mais cela ne lui a pas enlevé la solitude qui l’habite. Sa famille lui manque depuis qu’elle a fait le choix de couper les ponts avec elle par peur d’être démasquée et ramenée à sa couleur noire et de tout perdre.

L’autre moitié de soi a de grandes chances de rencontrer un grand succès et de faire partie des meilleurs ouvrages de cette rentrée littéraire. Il le mérite amplement car c’est un excellent ouvrage qui interroge sur les fragilités de l’être humain, sur la filiation, l’envie parfois de vouloir devenir autre chose que ce que l’on est et l’importance de trouver sa place dans une société qui ne nous en laisse pas toujours une ou qui nous en assigne une. C’est un ouvrage poignant qui dégage de très belles émotions, un livre qu’il faut absolument lire à mon humble avis.