Comédie dramatique de Christine Citti, mise en scène de Jean-Louis Martinelli, avec Darina Al Joundi, Christine Citti, Alain Fromager, Elisa Kane, Arthur Oudot et Laurence Roy.
Geneviève (Christine Citti), son frère Albert (Alain Fromager) et leurs amies Malika (Darina Al Joundi) et Estelle (Laurence Roy) vivent dans un monde qui ressemble au monde d'aujourd'hui, mais encore pire que lui. Le sort des "seniors" comme eux est désormais scellé administrativement par la réception d'un jeton, qui annonce leur mort imminente.
Dans cette dystopie, plus question de retraites ni par répartition ni par capitalisation, plus question de droits sociaux, de couverture mutuelle universelle. Il faut avoir les moyens sinon pas de troisième âge.
"Dans la fumée des joints de ma mère" commence quand Albert reçoit l'inévitable jeton. Au lieu de se lamenter, d'attendre stoïquement la mort, il va avec ses trois mousquetaires au féminin vivre joyeusement ses dernières heures.
Comme dans "La Grande bouffe", les quatre compères veulent mourir dans un mélange paradoxal d'élégance et de truculence. Et aux moments clés, ils seront bien accompagnés par la voix du dandy Christophe, entre "Mots bleus" et "Paradis perdus".
Sur une scène peu encombrée qui se transforme en terrain de jeu pour ce "road-mourir", domine devant l'écran vidéo un étrange aquarium pour Archibald le poisson rouge compagnon d'Albert. Étrange et technologique puisqu'il est surmonté d'une rampe de bowling d'où parfois émerger une boule, réplique miniature de la sphère lunaire qui veille à cette dernière nuit.
Avec beaucoup d'empathie, Jean-Louis Martinelli met en mouvement ce quatuor turbulent, les éparpille et les rassemble dans des déplacements erratiques ponctuées de discours incongrus ou touchants. Dans ce dispositif, Alain Fromager s'amuse le plus et n'hésite pas à surjouer, répondant aux invites colériques de Christine Citti. Darina Al Joundi et Laurence Roy sont plus dans la retenue, dans une partition en contrepoint à celle de leurs partenaires fou-fous.
Pour muscler leur délire et justifier le titre du spectacle, les vieux fourneaux s'empareront assez rapidement d'un dealer compréhensif (Arthur Oudot). C'est lui qui leur donnera la clé pour leur évanouissement définitif dont l'oraison sera rendue par la fille de Geneviève, Olympe (Elisa Kane).
Une belle oraison pour saluer quatre garnements dont les facéties équivalent à des actes de résistance face à un monde en voie de déshumanisation. . Une belle oraison pour saluer quatre garnements dont les facéties équivalent à des actes de résistance face à un monde en voie de déshumanisation.
Pied de nez à la théorie qui voudrait que la vieillesse soit toujours un naufrage, "Dans la fumée des joints de ma mère" ne verse pas non plus dans l'apologie de l'âgisme. L'intervention lumineuse d'une jeune fille pour conclure l'épopée de ces quatre zigotos et la présence d'un dealer trentenaire aussitôt complice de leurs bêtises montrent clairement que Christine Citti plaide pour une société fraternelle délivrée de la lutte des âges. |