Le groupe montréalais Bell Orchestre se produisait ce soir au Nouveau Casino.
Projet expérimental et instrumental mené par Richard Reed Parry (basse) et Sarah Neufeld (violon), tous deux membres à part entière d'Arcade Fire, Bell Orchestre comporte 3 autres membres : Stefan Schneider (batterie, percussions), Pietro Amato (joueur de cor français et membre de Thorngat) et Kaveh Nabatian (trompette, mélodica).
Ce soir, nous rencontrons Sarah Neufeld et Kaveh Nabatian.
Vous êtes ce soir au Nouveau Casino pour défendre Recording a Tape the Colour of the Light, cet album sorti voila un petit moment déjà…Comment se passe un concert de Bell Orchestre, comment parvenez à retranscrire ces plages atmosphériques, sans paroles ?
Kaveh : Le fait qu'il n'y ait pas de paroles... Cela fait des milliers d'années que les instrumentaux existent. Ce n'est pas dérangeant. Nous sommes plutôt dans une tradition classique ou jazz, avec des tendances modernes. Pour nous c'est normal, rien de choquant !
Bell Orchestre est clairement un projet à part d'Arcade Fire, dont vous faites partie. On retrouve néanmoins la même énergie, mais en instrumentales. Votre album est il fait pour la scène au bout du compte ?
Kaveh : Ce sont deux choses différentes, écouter cet album chez soi ou en concert. Cet album est très spécifique, avec un espace nostalgique. Il y a des gens qui rentrent dedans, d'autres non…
Sarah : De la distance sûrement aussi, avec ces ambiances oniriques…
Kaveh : Sur scène c'est assez étrange, c'est plutôt "dans ta face. In your face si vous voulez" (rires). Dans l'ensemble les gens rentrent plutôt dedans. Il y a plus de gens qui vont adorer la musique en live du fait de sa spécificité.
Les gens ne sont plus habitués à ce genre d'album sans compromis…
Kaveh : En même temps, il y a quand même beaucoup de groupes de jazz assez intéressants, à Paris, en Norvège ou en Suède que nous avons déjà rencontré. Il y a beaucoup de fans de rocks qui aiment notre musique aussi.
Dans le cadre de la musique rock, forcément c'est un peu anormal. Pour nous c'était évident car nous nous sommes réunis pour faire de la musique pour la danse contemporaine. Jouer avec des danseurs, improviser dessus, c'est devenu une habitude à force, sans qu'on y réfléchisse.
En réécoutant l'album cette après midi, je repensais à un autre album avec de grandes variations subliment orchestrées, c'est Tubular Bells de Michael Oldfield. Certaines ressemblances. Vous n'avez pas eu la tentation de réaliser la même chose, à savoir une seule et meme chanson comprenant plusieurs mouvements, comme une pièce de musique classique...
Sarah : On pourrait essayer ça, bonne idée !
Kaveh : On essaye de faire quelque chose de symphonique, mais à l'échelle d'une chanson. Effectivement, c'est une idée…
On parle de ruptures, d'accélérations, comme de grandes vagues qui monteraient et descendraient au fur et à mesure. La musique classique vous a-t-elle inspiré pour la création ?
Sarah : Bien évidemment... Nous sommes tous influencé par la musique classique, spécialement moi avec le violon. Vraiment important pour nous.
Kaveh : Il y a des liens directs entre notre musique et des structures, des auteurs classiques, comme Schubert ou Art Blackey... Indéniablement.
Il y a des moments très forts, très rock, et d'autres classiques justement. Comment le définiriez vous en quelques mots
Sarah : On peut dire que quelque fois cela peut être comme un film de cow-boys avec de la musique de chambre dans un rêve. (Rires)
Kaveh : Comme Lee Perry dans un film de Sergio Leone… C'est n'importe quoi de résumer l'album comme ça, cela dépend des humeurs, des mentalités. On n'aime pas la réduction et les étiquettes.
Comment s'est passé votre petit séjour dans le Vermont au moment de la création de Recording a Tape the Colour of the Light ?
Kaveh : Disons que j'ai une petite cabane dans le Vermont, où nous avons composé quelques chansons. En plein hiver, sans eau, par -30°... Cela nous a rassemblé évidemment. De la folie totale tu vois, obliger de mettre constamment du bois, d'où la chanson Throw it on a fire... Les lumières part 1 et 2..Cela prend du temps pour nous d'écrire des chansons, quelques idées qui germent, qui sont mises de coté. On y revient après..
Sarah : Et le mastering s'est fait à Montréal, pour des raisons économiques.
Kaveh: On a quasiment enregistré tout sur ruban, puis transfert sur digital. Grâce aux logiciels.
On parlait de visions oniriques pour Recording a Tape the Colour of the Light, des films vous ont-ils inspiré ?
Sarah : S'il y devait y avoir un film en particulier non. Idéalement, si Terry Gilliam. Nous ne sommes pas limités et pas stricts sur les idées
Kaveh : Ou des mangas qui sait. Moi je suis réalisateur, c'est mon travail premier. Mais de là à créer un film qui accompagnerait l'album. Il faudrait que tout le monde soit d'accord sur tout… Beaucoup de gens nous approchent pour utiliser notre musique. Peut être le prochain film de Wong Karwai qui sait… |