Après la rétrospective en 2018 au Kunsthaus de Zurich, le Musée Jacquemart-André programme en 2021 une exposition monographique consacrée au peintre britannique d’origine suisse Johann Heinrich Füssli (1741-1825)
Le commissariat est assuré par Christopher Baker, directeur des départements d’art européen et écossais et des portraits aux National Galleries d’Ecosse, Andreas Beyer, universitaire en histoire de l'art, et Pierre Curie, conservateur du musée précité.
Et afin d'en proposer une synthèse, ils ont opté pour un parcours thématique.
Füssli, "le Suisse sauvage" et la représentation de l’irreprésentable
Surnommé "le Suisse sauvage", explorant la survenance du surnaturel dans le réel comme dans l'espace mental, Füssli s'avère le metteur en scène de visions oniriques ressortant au fantastique comme autre vision du monde avec l'étrange pour esthétique et l'épouvante pour fondement.
Un surnaturel polysémique, du rêve à la folie, qu'il décline en reprenant à son compte les grands mythes intemporels, antiques et bibliques, et les légendes nordiques, à contre-courant du Néo-classicisme ambiant et du rationalisme du Siècle des Lumières au terme d'un imaginaire à l'esthétique singulière qui le positionne en précurseur du Romantisme noir et un onirisme, ainsi annonçant les tropismes du Symbolisme et du Surréalisme.
"Le Cauchemar" - "Béatrice, Héro et Ursule" - "Roméo et Juliette" - "Hamlet et le spectre de son père"
Et sans doute pressent-il ceux émanant de la littérature, et plus précisément des genres émergents du roman gothique et du conte fantastique, et du théâtre élisabethain de son temps qui ressortiront au panthéon national anglais en régalant l'Angleterre victorienne friande de féerique avec en tête de gondole les opus de William Shakespeare avec son projet de fresques composées à partir de ses opus majeurs "La Nuit des rois", "Le Roi Lear", "Macbeth et "La Tempête".
"Le renvoi d'Adam et Eve du paradis" - "La création d'Eve" - "Thor luttant contre le serpent Midgard" - "La vision de Saint Jean du Christ et des sept chandeliers de l’Apocalypse"
Füssli manipule ainsi les peurs archaïques tenant au diable, à la mort, à la sorcellerie et la communication avec l'au-delà en un siècle qui connait le développement des sciences occultes.
Et ce avec la pratique d'un syncrétisme singulier qui, au soutien d'un langage onirique et d'une dramatisation théâtrale, et au gré du Maniérisme instillé du clair-obscur caravagesque, du goût de "l’horror vacui" et de "la terribilità" de Michel-Ange, hybride notamment effroi et érotisme, fantastique et merveilleux, sublime burkien et grotesque.
Au coeur de son répertoire iconographique, la figure féminine entourée parfois de héros athlétiques, souvent d'émanations surnaturelles tels spectres, fantômes et sorcières et toujours de créatures chimériques.
"La mort de Didon" - "Lady Macbeth somnambule"
A ne pas rater sur ce motif la sélection d'oeuvres graphiques de la conséquente production personnelle de Füssli.
En préambule à la visite à voir :
un diaporama in situ de l'exposition
en vidéo la conférence de Jacques-Edouard Berger |