Le mois d’octobre est bien entamé, les feuilles semblent s’embraser sur leurs branches pour enfin tapisser le sol une à une. Le vent devient frais, charriant nuages lourds et pluie dans son sillage, on se met à l’abri chez soi et pour braver le froid et l’obscurité, on allume des bougies. Alors, bien au chaud, en sécurité, un livre à la main, à la lueur de chaque flamme vacillante, les ombres semblent prendre vie et nous observer.
Quoi de mieux en cette période qu’un bon comics pour scruter les ombres avec inquiétude et frissonner ?
Cet automne est marqué par le retour du génial duo formé par Skottie Young (I Hate Fairytales) et Jorge Corona (Les incroyables aventures de l’enfant plume) à l’origine de la trilogie jeunesse Middlewest (Urban Link), primée à plusieurs reprises. Dans Celui que tu aimes dans les ténèbres, le duo s’adresse cette fois à un public adulte avec un récit horrifique en un seul volume.
Ro est une peintre sous pression puisqu’elle doit fournir une nouvelle exposition et semble souffrir d’une sorte de syndrome de la toile blanche. A la recherche d’un environnement propice à l’inspiration, elle s’installe dans une grande demeure malgré les mises en garde de l’agente immobilière qui lui fait part de rumeurs disant qu’elle est hantée. L’artiste n’y croit pas trop et, moqueuse, s’adresse à un fantôme imaginaire pour tromper la solitude. Jusqu’au jour où une entité semble répondre.
Une montée en puissance et en tension particulièrement bien menées dans ce récit qui fait froid dans le dos. On peut lire en filigrane une métaphore des relations toxiques pertinente et glaçante.
On retrouve la nervosité du trait de Jorge Corona son travail des couleurs et ses jeux de lumières qui m’impressionnaient déjà dans Middlewest et donnent réellement vie à cette nouvelle histoire.
Si je dois faire un reproche sincère à Celui que tu aimes dans les ténèbres, je dirais qu’il est trop court. J’aurais aimé sombrer un peu plus, un peu plus loin dans cette maison plongée dans la pénombre, habitée d’une présence mystérieuse dont on aimerait en savoir tellement plus. Skottie Young et Jorge Corona nous offrent une histoire qui semble à peine effleurer un univers qui pourrait être développé davantage et certaines questions peuvent rester en suspens une fois la dernière page tournée.
Cependant, cette frustration donne à Celui que tu aimes dans les ténèbres des allures d’histoires horrifiques qu’on se raconte à la lueur d’une lampe de poche pour se faire peur. Alors, à l’approche de la nuit d’halloween, vous ne pouvez que vous laisser tentez.
Enfin, si vous l’osez. |