Habitué de lire des romans ou des polars publiés par les éditions Calmann-Lévy, il m’arrive quand même de lire aussi des ouvrages d’histoire, particulièrement ceux écrits par Antony Beevor qui s’est spécialisé dans l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Après avoir chroniqué son ouvrage sur Stalingrad en 2019, je me suis lancé dans son dernier livre qui traite et de la révolution et de la guerre civile en Russie entre 1917 et 1921.
La révolution russe de février 1917, puis le coup d’État d’octobre et la guerre civile qui s’ensuivit furent des événements parmi les plus déterminants de l’Histoire contemporaine. Ils ne furent même pas à proprement parler russes, car ils mirent aux prises de multiples parties prenantes, chacune ayant une cause particulière à défendre – nationale, ethnique ou de classe.
En 1917, quand la Russie impériale, archaïque et vermoulue, sapée aussi par sa gestion calamiteuse de la guerre, se désagrège, Lénine et ses bolcheviks s’emparent du pouvoir par la ruse, la terreur, et par un sens de l’organisation hors du commun. Pendant trois ans, la Russie va connaître une guerre civile d’une férocité inimaginable. Dès 1918, Lénine décrète la Terreur rouge : tout aristocrate, tout bourgeois doit être sommairement exécuté en tant qu’ennemi de classe. De leur côté, les Blancs sont minés par les désaccords politiques et desservis par les exactions commises par leurs cosaques.
La propagande du camp victorieux a tout fait pour déformer et reconstruire ce conflit sous la forme d’un geste héroïque. Il est restitué ici pour ce qu’il fut, à savoir sans aucun doute, avec ses six à dix millions de morts, l’un des plus barbares de l’ère moderne.
Construit autour de quatre parties qui concernent les quatre années de la période étudiée, l’ouvrage revient évidemment avec précision sur les évènements de février et d’octobre 1917, sur ses principaux acteurs (Lénine, Kerenski, Broussilov, Kornilov…). Il revient aussi sur Brest-Litovsk, montrant comment Lénine bouleverse les conventions traditionnelles de la diplomatie. Il traite aussi de l’année 1918, particulièrement mouvementée, la Russie se trouvant entourée par de nombreux ennemis mais aussi contestée à l’intérieur. L’armée rouge se retrouve en grande difficulté cette année-là.
L’ouvrage s’accompagne de photos, de cartes qui éclairent les propos de l’auteur quand il nous embarque dans les contrées lointaines russes comme la Sibérie.
L’exploitation d’innombrables archives inédites a permis à Antony Beevor de nous raconter et de nous expliquer, comme jamais auparavant, ce cercle vicieux de la terreur qui a exacerbé les tensions politiques dans le monde entier et abouti à la Guerre d’Espagne et à la Seconde Guerre mondiale. |