Partition dramatique écrite et mise en scène par Pascal Rambert, avec Charles Berling et Stanislas Nordey.
Après "Clôture de l'amour", "Argument", "Reconstitution" et "Soeurs", l'auteur et metteur en scène Pascal Rambert poursuit dans l'écriture de partition dramatique pour deux acteurs en situation de confrontation.
Avec "Deux amis", celle-ci se déroule en deux actes entre deux comédiens-metteurs en scène et couple à la ville depuis trois décennies.
Tout commence par une âpre discussion professionnelle autour de leur projet commun de réitérer la présentation des quatre des pièces majeures de Molière à la manière d'Antoine Vitez en 1976 pour laquelle l'auteur argumente, avec moult arguties sur le genre du théâtre pauvre et la fameuse équation vitézienne "une table, deux chaises et un bâton".
Ce premier acte sur les splendeurs et misères du théâtre, intégrant quelques digressions sur l'homosexualité et une dispensable scène démonstrative, est émaillé de virulentes diatribes, de l'inculture à l'incompétence, à l'encontre de la nomenklatura médiatique, et plus spécifiquement les journalistes qualifiés de culturels et les critiques de théâtre, les metteurs en scène, les comédiens et même le public.
Un micro événement, la lecture d'un SMS laconique sinon ambigu par celui auquel il n'était pas destiné, entraîne le basculement de la controverse conceptuelle, aux accents de danse de mort strindbergienne par la violence intrinsèque à la relation de couple, sur la geste théâtrale en prosaïque comédie de moeurs sur le thème de la scène de ménage.
Après un intermède disruptif sur le "Paranoïd" du feu groupe de hard rock Black Sabbath et la destruction du mur d'accessoires mobiliers sis en fond du plateau vide, le deuxième acte de l'opus dédié à la puissance de l'amour à la vie à la mort, en l'espèce cet amour de jeunesse voué au serment de fidélité, jusqu'à ce que la mort nous sépare, ayant survécu aux ravages du temps, se déploie en évocations bibliques, ainsi le lavage puificateur du corps et la déploration de la Vierge, dans la froideur clinique de fin de vie.
Au jeu, sous la direction de Pascal Rambert, les deux personnages, l'un frénétique, l'autre placide, sont respectivement campés par Stanislas Nordey, toujours efficace dans le discours didactique et Charles Berling remarquable jaloux en mode drama-queen.
Bien évidemment incontournable pour les inconditionnels rambertiens.
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