Fiction mythologique d’après Les Métamorphoses d’Ovide adaptation et mise en scène de Géraldine Szajman, avec Manon Combes et Vivien Lenon.
Géraldine Szajman a concocté un singulier et passionnant opus qualifié de fiction mythologique qui, sous le titre "Petites histoires de la démesure", se compose de deux récits issus des "Métamorphoses" d'Ovide.
Il les décline sous deux angles, celui narratif avec le travers des caractères, la cupidité et la mégalomanie, et celui métaphorique à l'aune du temps présent en double résonance, d'une part, avec des préoccupations actuelles - la nature/l'écocide et l'or/l'ultra-libéralisme - et la crise des valeurs et, d'autre part, le thème commun de l'hubris qui caractérise la personnalité de certains hommes de pouvoir du 21ème siècle.
La légende du roi Midas illustre le matérialisme compulsif comme marqueur de la toute puissance personnelle dont la morale tient à ce que le minimum vital peut manquer à celui qui possède tout et celle plus étayée d'un autre roi moins connu du grand public, Erysichton, qui procède à l'abattage d'un arbre sacré multiséculaire qui porte ombrage à son orgueil démesuré.
Car l'homme se veut le fondateur déique d'un monde nouveau qu'il développe pour la foule dans une harangue de tribun de l'époque du réalisme soviétique.
Imaginée par Géraldine Szajman, elle use avec sagacité et causticité de la terminologie et de la rhétorique de la refondation ("Je me tiens ici devant vous à l'aube d'une ère nouvelle", "Je vous donne l'opportunité de réinventer nos vies" "Rassemblons nous autour de mon projet") avec l'antienne innovation/transformation/régulation qui ne sont pas sans rappeler le discours d'un président de la République en exercice.
Bien évidemment dans la mise en scène assurée par Géraldine Szajman, et même si cette partition est annoncée comme délivrée à la manière du conte, il ne s'agit pas d'une veillée au coin du feu d'autant qu'elle est dispensée de manière dantesque par Manon Combes.
Dès l'entrée en salle du public et sans ambages, Manon Combes invite à un lâcher prise pour cette immersion dans la Grèce antique au temps béni des Dieux et ne s'en laisse pas conter (sic) menant l'entreprise tambour - plutôt synthétiseur - battant avec le surlignage musical de Vivien Lenon qui, opère par mixage de la percussion tribale à la grandiloquence de la musique de péplum.
Elle investit le plateau nu avec l'énergie du mouvement perpétuel et elle dispense une ébouriffante et maelstromqiue prestation grâce à sa belle palette de jeu et sa maîtrise de la dramaturgie gestuelle pour porter des dérives contemporaines bien ciblées et théatralisées qui ressortent à l'intemporel.
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