Après un déjeuner pas des plus light à la cantine Chez Ben On S'Bourre La Bedaine pour goûter leur fameuse poutine, il est temps de se rendre au second jour des vitrines du Festival International de la Chanson de Granby, 55ème édition. Des artistes viennent proposer des extraits de leur nouveau spectacle à des diffuseurs venus du Québec, du Canada et d'Europe. Le point commun à tous ces projets est de s'inscrire dans la francophonie. Les diffuseurs viennent donc "faire leur marché", en fonction du public visé par leur salle de spectacle ou festival. Les artistes qui se succèdent ne s'inscrivent donc pas dans une même esthétique musicale ou dans un style préalablement cadré. C'est d'abord la parfaite occasion de découvrir de nouveaux talents.
Suzanne Belaubre est originaire de Toulouse. Elle a sorti son premier album en 2021, qui mélange des éléments d'électro et de chanson française. Quelques sons pré-enregistrés et accompagnée d'un batteur, cette formule légère lui permettent d'occuper le devant de la scène et d'établir le contact avec le public. Parfois derrière son clavier, ou s'accompagnant en sifflant, sa variété se teinte ci et là d'accords moyen-orientaux. C'est lorsque la batterie, très présente, donne parfois un côté hypnotique aux chansons que Suzanne Belaubre livre le meilleur d'elle-même, comme sur "Alice Alice".
Le Québécois Bønanza, de son vrai nom Dominic Pelletier, a fait paraître son premier album, Prince Limonade, en 2022. Avant de se lancer en solo, Bønanza a fait partie de plusieurs groupes, dont The Hunters, Caravane et New Bleach. Il a plus de 15 ans d'expérience de la scène, et ça se voit.
Ce projet d'inspiration funk bénéficie de bons musiciens, clavier, percus, saxo et batteur qui insufflent une énergie imparable aux chansons. Le chanteur, combinaison jaune, tatouages et moustaches en bandoulière se donne à fond, même devant un public de pros. On regrettera néanmoins les paroles d'une poésie assez peu mature qui pourrait rapprocher Bønanza d'un Claudio Capéo qui ferait des cocottes à la guitare électrique plutôt que de jouer de l'accordéon. On soulignera la réaction très positive du public.
Originaire de Saint-Claude au Manitoba et montréalaise d’adoption, Geneviève Toupin, alias Willows, a déjà sorti deux albums, en 2009 et en 2012. Elle a ensuite senti le besoin de se reconnecter avec ses racines métisses de l'ouest, un peuple descendant des habitants autochtones et des Européens. Elle sort un premier album sous le nom de Willows en 2014, puis participe ensuite à un groupe du nom de Chances en 2016.
En 2018, le groupe fait paraître l’album Traveler, aux sonorités beaucoup plus électroniques. Lorsqu’un problème familial l'oblige à rentrer au Manitoba pour un séjour prolongé, elle est ramenée à ses racines, sa famille et à la culture manitobaine dans laquelle le lien avec la nature est particulièrement important.
Son nouvel album Maison Vent est sorti il y a quelques mois. À la guitare acoustique accompagnée d'un batteur et de quelques bandes, elle développe un univers vraiment personnel, avec une rythmique assez martiale et une voix qui n'est pas sans rappeler celle de Kate Bush. Gros coup de cœur de ma part pour cette artiste singulière.
Autrice-compositrice et interprète, la chanteuse Tamara Weber a commencé à faire de la musique dès son plus jeune âge. Elle a participé à La Voix, à la télévision québécoise en 2014, puis à The Voice France en 2016. En 2014, elle sort son premier album pop folk, Time, Wind & Fire. Peut-être l'avez-vous aussi croisée sur des premières parties pour des artistes tels que Ben L'Oncle Soul ou Bobby Bazini.
Sur scène, on pense bien entendu à Tracy Chapman pour le style, ou aux chansons les plus pop de Patrice. Elle peut se targuer d'une belle présence et d'une sensibilité dans les textes qui ne laisse pas indifférent pour les textes. Sa chanson "Harlequin" est une bonne porte d'entrée vers son univers.
Roselle est une artiste québécoise qui fait de la musique pop électro disco. Accompagnée de deux musiciens, son style pourrait s'apparenter à celui de Vendredi Sur Mer. Le public visé semble être les jeunes TikTokeurs. J'avoue être resté assez hermétique à l'univers de cette jeune artiste qui a néanmoins du potentiel.
Le soir, après les rencontres professionnelles, des spectacles ouverts au public sont encore proposés dans divers lieux de la ville. Ce soir-là, à la Chaufferie, un bar-distillerie dans une ancienne friche industrielle de briques rouges, se produit Samuele.
Elle a été la grande gagnante du FICG en 2016, mais depuis sa transformation de genre, cet artiste trans précise qu'iel préfère l'usage de ce pronom et les substantifs au masculin lorsqu'on parle de lui.
Le thème du genre habite les chansons de Samuele, et c'est souvent sous cet angle qu'iel aborde les chansons d'amour, d'attirance ou de rejet par l'autre.
Musicalement, dans la petite salle de la Chaufferie, iel sait faire monter l'ambiance et joue au plus près des spectateurs, accompagné d'une bassiste et d'un batteur, qui passe parfois aux machines, Samuele envoie le bois. Terminant son concert par une version musclée du "Chanteur" de Daniel Balavoine, on peut être sûr que cet artiste va bientôt faire parler de lui en France.
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