Réalisé par Achero Manas. Espagne. Drame. 83 minutes. 2000. Sortie le 13 mars 2024. Avec Juan José Ballesta, Pablo Galan, Alberto Jimenez, Manuel Moron, Nieve de Medina, Aria Wagener.
"El Bola", c'est le surnom de Pablo, un garçon solitaire d'une douzaine d'années. Dans sa poche, il y a toujours une boule qui ne le quitte jamais. Pas très liant, il participe néanmoins au "jeu de la mort" sans d'ailleurs s'y adonner lui-même : un gamin place un objet au milieu des rails d'une voie ferrée. Quand le train arrive, il faut, au dernier moment jaillir pour ramasser l'objet... et ne pas se faire écraser.
Pendant quelques scènes, le jeu est au centre du film à tel point qu'on ne sait pas tout de suite que son vrai thème est la maltraitance que subit Pablo, souffre-douleur de son père.
On emploie "maltraitance" mais ce que subit le jeune garçon est plus proche de la torture : les coups pleuvent drus sur lui.
Si le film met du temps à aborder son sujet, c'est que tout seul, Pablo ne peut que subir. Il lui faut objectivement connaître un copain heureux pour comprendre que ce n'est pas normal d'être couvert e bleus et de décider de contre-attaquer.
Quand il y a un nouvel élève dans sa classe, Alfredo, il ne sait pas pourquoi, lui qui ne parle à personne, décide de se faire violence pour rentrer en contact avec lui. Peut-être; s'aperçoit-il aussi que ses compagnons du "jeu de la mort" sont prêts à s'embrouiller avec Alfredo, qu'il est donc potentiellement quelqu'un qu'on va harceler et qu'il se sent proche de lui... Dès lors, il découvre qu'Alfredo a une famille idyllique, avec un père artiste tatoueur et un mode de vie bien différent du sien, fils d'un petit quincailler avec une mère soumise et un lourd secret de famille : la mort d'un premier garçon.
Purement narratif, "El Bola" a les qualités des films que l'on aime lorsqu'on ne sait pas encore qu'il y en a qui "veulent faire penser". Acheros Manas, lui, ne cherche qu'à dénoncer les parents terribles et surtout le silence de ceux qui les connaissent. Tout l'entourage du quincailler, ses voisins en premier, se doutait du traitement peu amical que ce père qui se voulait sévère administrait à son fils. Mais, s'ils jouaient les empathiques avec Pablo, aucun n'avait signalé aux autorités leurs soupçons de coups. Il aura fallu le père d'Alfredo, un père bien différent d'eux, genre bobo espagnol, pour qu'il s'y colle avec une amie spécialiste de la psychologie infantile.
Acheros Manas sait diriger jeunes et vieux. Ce film estimable a reçu les plus hautes récompenses du cinéma espagnol, à commencer par le Goya du meilleur film en 1981.
Il peut être conseillé à tous les publics. Aura-t-il eu un impact en Espagne pour faire reculer les violences parentales ?
Difficile à dire. Il avait l'intérêt de mettre en parallèle ce que risquaient les enfants jouant à des jeux stupides, comme celui de se jeter sur les voies pour éviter le passage d'un train, et ceux que les parents corrigeaient indûment. Manque à l'appel, un danger plus actuel, celui du harcèlement scolaire, à peine esquissé ici mais désormais très présent et qui effraie davantage les parents modernes...
Philippe Person
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