Spectacle écrit et mis en scène par Simon Abkarian et interprété par Aurore Frémont et Brontis Jodorowsky.
Dans le cadre du diptyque "Une odyssée en Asie mineure", la chaleureuse Compagnie des 5 Roues, après "Ménélas rébétiko rapsodie", en propose le second volet : "Hélène après la chute".
Après dix ans de captivité pendant lesquelles elle a été la prisonnière de Pâris et son amante, Hélène retrouve son mari Ménélas qui vient de battre les Troyens dans une guerre sans merci.
Désabusée mais encore combative, se sachant en danger de mort, elle tente avec franchise de dire sa vérité. Reine déchue dont elle garde le port de tête et l'orgueil, elle se bat avec pugnacité.
Tout de noir vêtus, les trois officiants sont devant des micros ou le piano sur lequel Macha Gharibian accompagne magnifiquement ces retrouvailles, jouant la musique ô combien évocatrice qu'elle a composée et chantant des accords éthérés de sa voix gracieuse.
S'engage alors entre Hélène et Ménélas, un affrontement à fleurets mouchetés d'abord, qui sera bientôt emporté par la passion qui les anime tous deux. Sur le plateau, le duo, d'une technique irréprochable, offre un duel tendu et un face à face de haute volée.
Aurore Frémont est une exceptionnelle comédienne qui, sous la direction précise de Simon Abkarian dessine de sa belle voix grave une histoire à chaque regard ou chaque inflexion et donne à voir tantôt avec gravité, ironie, colère ou violence tous les sentiments contradictoires qui agitent Hélène. Elle est d'une extraordinaire intensité.
Face à elle, Brontis Jodorowsky est un Ménélas à la fois lucide et en proie au doute qui montre une autorité naturelle peu à peu vacillante face à celle qu'il a toujours aimée. Il est magistral.
Le dialogue, aussi concret que poétique, dans la langue charnelle et puissante de Simon Abkarian est d'une perfection absolue. La confrontation entre les deux époux, d'une tension qui ne faiblit pas pour se rejoindre enfin dans une franchise bouleversante, produit un grand moment de théâtre qui captive autant qu'il sidère par la beauté de la langue et la perfection de ses trois artistes.
La mise en scène de Simon Abkarian, d'une belle sobriété, fait entendre idéalement le texte par ces deux interprètes magnifiques dirigés au cordeau pour délivrer ce bijou brillant de mille feux, d'une élégance folle et d'une exigence rare.
Somptueux !
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