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puce Les Oubliés de l'Amérique
Sean Baker  (octobre 2024) 

Réalisés par Sean Baker. Sortie le 23 octobre 2024.

Rien de tel qu'une Palme d'or pour braquer les projecteurs sur un réalisateur qui, jusqu'à là, n'attirait pas les articles ni les rétrospectives. A presque 55 ans, Sean Baker a pourtant huit films et deux séries télés à son actif.

Quand il a reçu la récompense suprême en mai, pour Anora, la première réaction de presque tout le monde a été de se dire : "qui c'est celui-là "?

Et pourtant, en regardant aussitôt sa fiche Wikipédia, le critique moyen pouvait se dire : "Ah ! Oui ! Bien sûr !". Il y a quatre ans, son film précédent, Red Rocket, était déjà en sélection officielle à Cannes et c'était un film très réussi. On avait aimé sa décontraction, son côté film vraiment indépendant, vraiment surprenant. Sa manière de raconter l'Amérique des fauchés sans en faire tout un plat.

En grattant encore un petit peu, on s'apercevait aussi qu'on avait déjà loué un film de Sean Baker, Tangerine (2015), un des premiers films où des acteurs trans avaient la vedette et quelque chose à jouer. Les curieux retrouveront l'article dans les archives de Froggy's Delight et découvriront tout le bien qu'on en avait pensé. On y voyait une petite parenté avec Tarentino, mais pas que...

Ajoutons enfin qu'on avait trouvé que The Florida Project (2017) était lui aussi un des rares films américains indépendants qui perpétuait la tradition d'un certain cinéma social étasunien, sans l'inévitable formatage "Sundance" et en ayant vu les films des Dardenne...

Bref, sans le savoir, on savait qui était Sean Baker. On pouvait, cependant, constater avec son exemple, qu'à l'exception des blockbusters et des vieux maîtres fatigués et fatigants (comme Scorsese), on avait perdu le fil avec l'ensemble de la cinématographie d'outre-Atlantique.

Les quatre films de Sean Baker proposés cette semaine avant l'arrivée prochaine de sa Palme d'Or sur les écrans font ainsi autant préparation au "chef d'œuvre" couronné à Cannes que réparation pour connaître une carrière qui n'a pas besoin d'étoile dorée pour être connue et reconnue.

"The Jokers", le distributeur qui sort ces quatre films a surtitré l'événement : "les oubliés de l'Amérique". Cela convient assez bien à définir ceux que Sean Baker montre. On pourrait aller jusqu'à employer le mot "exalte". Car il est avant tout un excellent directeur d'acteurs.

Qu'il filme un livreur chinois à vélo sous la pluie à New York, un ghanéen perturbé dans ses petits trafics par le retour inopiné d'un enfant, une actrice porno et une vieille dame devenant d'improbables copines, à chaque fois, on a l'impression qu'il a trouvé des comédiens de la stature de Robert De Niro ou de Meryl Streep.

Peut-être que "The Jokers" auraient pu choisir le mot "anonymes" à la place d'"oubliés". C'est le cas des jeunes gens de Take Out (2004), film tourné avec un budget dérisoire, qui montre d'emblée que Sean Baker a un regard.

A l'heure des films type "American Pie", lui décrit des jeunes adultes essayant de revisiter leurs années de collège alors même qu'ils n'en sont finalement jamais sortis... Un film original, mais peut-être celui qui a le moins de ressemblance avec les autres films de Sean Baker.

Pour entrer dans son œuvre, ou si l'on n'a pas le temps de voir les quatre films, on conseillera de commencer par Prince of Broadway (2008), consacré à un jeune livreur chinois devant multiplier les allers et venues à vélo pour rembourser une dette. On y verra un petit rapport avec "L'histoire de Souleymane" et tout l'art de Baker pour ne pas dramatiser la vie des "humbles".

Ici, comme dans presque tous ses films, la situation est dramatique... mais jamais désespérée. D'une part, les personnages ne sont jamais résignés, d'autre part, alors qu'ils ne s'y attendent pas toujours, surgit toujours quelqu'un pour leur tendre la main. Baker n'est pas un pessimiste absolu. Il croit en la solidarité. Même si ce n'est pas toujours pour de bonnes raisons que les choses adviennent (comme dans Starlet), une vieille dame solitaire et atrabilaire peut devenir l'amie d'une jeune femme égoïste et sans gêne...

Dans un cinéma américain violent et cynique - n'est-ce pas Messieurs Cohen, Gray et Scorsese ? - Sean Baker apporte un vent de fraîcheur. Par moment, son cinéma dynamique et joyeusement foutraque rappelle le cinéma de Milos Forman (période tchèque) ou Iosselliani (période géorgienne).

Il est sans doute celui qui est le mieux arrivé à donner au cinéma indépendant américain un petit goût européen. Sans stars, mais on le répète avec des acteurs extrêmement bien choisis et dirigés, il raconte à chaque fois une petite histoire américaine sans se prendre pour un sociologue ou un moraliste. Oui, vraiment, il mérite d'être adoubé parmi les réalisateurs les plus intéressants de l'époque. Si possible, il faut voir les quatre propositions avant de déguster Anora.

 

A lire sur Froggy's Delight :
La chronique de "Tangerine" du même réalisateur


Philippe Person         
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# 1er décembre 2024 : de quoi se réchauffer

En attendant l'avant-dernière Mare aux Grenouilles de l'année le 6 décembre, voici notre sélection culturelle de la semaine.

Du côté de la musique :

"Cartoon Darkness" de Amyl and The Sniffers
"Day After Day" de Cy
"Reboot" de Harun
"Hydropath" de Isil Bengi
"Dummy light in the chaos" de Montañita
"O Days" de NLF3
"Nouveau Ministère" de Planterose
"Silence the night" de Sang Froid
"Drag N'Fly" de The Dynamics

et toujours :
"Secte" de 1=0
"Country" de Baptiste W Hamon
"French Manhattan" de L'Ambulancier
"Après le déluge (et autres illuminations d'A. Rimbaud)" de Les Enfants d'Icare
"Mégaphenix" de Mustang
"The good kind" de Our Girl
"Come ahead" de Primal Scream
"The day lady Rachel died" de Sacha Gordon & The Weird Orchestra
Interview de Sophie Darly autour de son album "Slow down fast"
Nouvel épisode "L'enfance - Partie 2" de la nouvelle saison du Morceau Caché !

Au théâtre :

"After Show" au Théâtre du Rond-Point
"For Gods Only" au Théâtre du Rond-Point
"Tu connais la chanson ?" au Théâtre Le Funambule
"Yvonne ou ma génération Y" au Théâtre La Flèche

et toujours :
"Dialogues de bêtes" au Théâtre Le Lucernaire
"Body concert" au Théâtre du Rond-Point
"Iphigénie à Splott" au Centre Wallonie-Bruxelles
"Psychodrame" au Théâtre de Suresnes Jean Vilar
"Tribu Nougaro" au Théâtre Hébertot
"La chute de la maison Usher" au Théâtre Darius Milhaud

"n degrés de liberté" au Théâtre de Belleville
"Lumière !" au Théâtre Le Lucernaire
"Pauvre bitos ou le diner de tête" au Théâtre Hébertot

des reprises :
(des pièces déjà chroniquées qui reviennent à l'affiche, atttention, parfois c'est dans un théâtre différent)
"L'Art d'être bête" au Théâtre de Poche Montparnasse
"Toutes les choses géniales" au Théâtre Le Funambule Montmartre
"Comment va le monde ?" à Théâtre Essaïon
"66 jours" à La Scala
"Intra Muros" à La Pépinière Théâtre
"Des ombres et des armes" à La Manufacture des Abbesses
"Changer l'eau des fleurs" au Théâtre Lepic
"Je m'appelle Erik Satie comme tout le monde" au Théâtre Le Funambule Montmartre

Du côté de la lecture :

"Les opérations de la Seconde Guerre mondiale en 100 cartes" de Jean Lopez, Nicolas Aubin & Benoist Bihan
"Ecrits sur le cinéma" de Pauline Kael
"L'héritière" de Gabriel Bergmoser
et toujours :
"De cendres et de flammes" de Kate Mosse
"Histoires de la seconde guerre mondiale" de Jean Lopez & Olivier Wieworka"Dernier meutre au bout du monde" de Stuart Turton
"Sparte contre Athènes" de Manuel Rodrigues de Oliveira

Un peu de jeux vidéo :

"Exographer" de SciFunGames

Aller au cinéma ou regarder un bon film :

"Slow Pulse Boys, the story of And Also The Trees de Sébastien Faits-Divers & Alexandre François
"Au Boulot !" de Gilles Perret et François Ruffin
"Le repli" de Joseph Paris
"Rivière" de Hugues Hariche
"Les oubliés de l'amérique" et autres films de Sean Baker
"Terrifier 3" de Damien Leone
"Papa est en voyage d'affaires" de Emir Kusturica

Et toute la semaine des émissions en direct et en replay sur notre chaine TWITCH

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

           
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