La pochette et le disque portent la date de 2005. Pourtant, c'est bien en avril 2006 que le premier album de Mon, autoproduit et éponyme, a fini par sortir. Après une longue attente. Initialement prévu comme EP pour septembre 2005, le disque a fait les frais de toute une série de contretemps, de changements de line-up, de délais, d'encore plus de contretemps, de recherche de locaux et autres contretemps supplémentaires, avant de voir le jour. Et pour ceux qui avaient eu la chance de mettre la main sur la démo du groupe, sortie en 2004 et qui laissait espérer de bien belles choses, il faut bien reconnaître que l'attente fut longue.
Avec ce premier album, Mon confirme tout le bien que l'on avait commencé à penser de lui. Avec une formation légèrement remaniée mais toujours aussi étendue ("resserrée" autour de neuf personnes, qui trouvent encore le moyen de s'adjoindre les services de six invités), le groupe continue à proposer un post-rock ample, foisonnant, un rien baroque.
Ceux qui avaient aimé la démo retrouveront avec plaisir "Fimm" et, surtout, "Try", deux titres qui y figuraient déjà. Ici comme là-bas, "Try" risque d'ailleurs fort, par son intensité, de jouer un rôle de premier plan, malgré une orchestration et des arrangements nouveaux qui lui font perdre un peu de la puissance brute qu'il avait sur la démo tout en améliorant la qualité de l'enregistrement de l'ensemble : on entend mieux, c'est certain, ce qui est joué - mais la musique, elle, se fait-elle réellement mieux entendre ? Le morceau reste néanmoins très convaincant, par sa puissance évocatrice et la maturité de son écriture.
Pour beaucoup, la signature sonore de Mon, c'était son quatuor à cordes. Si cet album ne dément pas l'importance des violons, altos et autres violoncelles, il laisse également plus de place aux cordes traditionnelles du rock, guitares et basses, donnant ainsi aux compositions de nouvelles directions. Du format concis de "Shannon" (3'51), dominé par une guitare qu'on dirait échappée d'une intro de Franck Black, à la patiente ascension de "Ti", guitare et basses en premiers de cordée, le rock & sa saturation démangent Mon, pour notre plus grand plaisir.
Reste que l'ensemble est toujours aussi nettement plus godspeedien que pixique, l'excellent "SMZ" rappelant même assez clairement le Rocket falls on rocket fall de Yanqui U.X.O (c'est-à-dire : rappelant assez clairement les arpèges de la "Sonate au clair de lune" de Beethoven). Peut-être aussi les chœurs qui hantent cet album, distants, chantant dans des langues non identifiés, rappelleront-ils à certains l'une ou l'autre des incarnations de A Silver Mount Zion.
Mais la véritable identité de Mon réside plutôt dans l'alchimie réussie entre instruments et instrumentations rock et classique. Alchimie particulièrement réussie, parce que précisément elle ne se donne pas à entendre telle quelle. Mon ne tombe jamais dans le piège de proposer une pièce curieuse, dont le seul intérêt serait, de façon très marketing, de réunir des univers différents. Non, Mon ne propose pas avec son premier album la dernière fusion à la mode. Le groupe se contente de poursuivre l'exploration d'un univers musical singulier et riche, où cohabitent et s'accouplent des sensibilités différentes - donnant naissance à une musique qui parvient à être véritablement originale, irréductible à son ascendance. |