Un tout petit peu de repos et c'est reparti pour la plus grande journée de ce festival. La plus longue et aussi la plus prisée à en voir les réservations complètes depuis presque un mois et les multiples demandes de renseignements du public sur cette programmation.
L'an dernier c'était Scorpions qui avait fait venir des fans de la France entière, cette année ce sont à la fois les légendes du rock, réunies pour la première fois sur la même scène, mais aussi et surtout la reformation de Trust pour la réalisation d'un DVD unique.
On prend son souffle, une chopine pour la route et c'est parti pour un marathon de plus de 10 heures de musique de tous les horizons.
Tout commence au Canada avec Le Nombre.
Etonnant groupe de rock énergique, ils peinent un peu à faire bouger les premiers festivaliers couchés sous le soleil après le déluge d'hier.
Ce n'est pourtant pas faute de mettre des décibels sur cette scène 2.
Après un petit nettoyage des écrans couverts de boue, la grande scène des Terre-Neuvas ouvre ses portes avec la fine équipe du Maximum Kouette.
Quatre filles et trois garçons, des couleurs bigarrées, des couettes (évidemment) et une petite heure de punk rock ska soutenant de jolis textes et avec un jeu de scène parfait. Superbe entrée en bouche.
Le festival des Terre-Neuvas a souvent été critiqué pour certains éléments de sa programmation. Aux têtes d'affiche du rock actuel se sont toujours mêés d'autres artistes plus populaires, et cela avec la grande bénédiction des programmateurs qui ont toujours revendiqué faire un festival pour tous publics avec des artistes capables de rassembler plusieurs générations.
Cette année, c'est peut-être Bonnie Tyler cet après midi sur la scène 2 qui prend ce rôle de rassembleur, le clin d'oeil qui fait se cotoyer les ados rebelles et leurs parents devant la même scène.
Tous les ans c'est la même histoire : les critiques fusent sur ces choix, et finalement une heure après le concert, jeunes comme vieux chantonnent les tubes qu'ils viennent d'entendre. Ce fut évidemment le cas cette année encore.
Cela dit, après le passage de Miss Bonnie, plutôt énergique, il est temps de prendre un grand moment de relaxation avec Patrice, l'homme qui a réconcilié le reggae et la pop.
Patrice est unique, souriant, il chante Bobital et le football, il joue avec ses musiciens et surtout il propose de magnifiques chansons dans un concert totalement réussi, comme d'habitude.
Les organisateurs nous avaient parlé de soirée exceptionnelle, de légendes du rock. Ils ne croyaient pas si bien dire à l'époque où ils avaient avancé ces propos. Tous les styles défileront ce soir devant les 40000 spectateurs du festival complet pour l'occasion.
La légende de l'ombre : Hubert Félix Thiéfaine.
Ce franc-comtois connaît les concerts complets comme ce soir puisque depuis presque trente ans, il n'a vu que cela.
Malgré une absence totale des médias (avant son dernier album et surtout l'album hommage que lui ont offert les jeunes pousses de la chanson), il draine depuis tout ce temps un cortège de fans, amis depuis le biberon de la fille du coupeur de joints ou de l'héroine des mathématiques souterraines.
Beaucoup de classiques mêlées aux meilleures chansons du dernier album pour un concert exceptionnel. Le chanteur est omniprésent, plein de mimiques, de mouvements saccadés, et soutenu par le fantastique Yann Péchin à la guitare et des musiciens péchus moins classic-rock que sur la précédente tournée en groupe.
Un concert exceptionnel .
La légende des années 80 : Jean-Louis Aubert.
La soirée 'légendes' continue avec l'ex-leader de Téléphone (en attendant peut-être un concert exceptionnel en 2007, qui sait ?).
Fidèle à lui-même, il déballe les titres en mélangeant sa carrière solo avec des standards de Téléphone.
Rien à redire pour celui qui depuis le split de son célèbre groupe a toujours su se renouveler sans finalement changer grand chose.
Les futures légendes : Mickey 3D.
Ou comment de petites ritournelles cheap chantées par une voix de monsieur tout le monde peuvent faire devenir l'un des plus grands groupes français. Les stéphanois aiment la musique et ça se voit. Pas de fioritures, de la simplicité et toujours un très bon moment d'un festival, ils reviendront même deux fois pendant que sur la scène 1, les gens attendent les stars américaines.
Les Légendes : Chuck Berry, Little Richard, Jerry Lee Lewis.
C'est peut-être ceux qui ont fait le plus parler en attendant cette 9ème édition des Terre-Neuvas. Viendront-ils, ne viendront-ils pas ? seront-ils bons, mauvais, trop vieux, trop mous ?
Un article de Ouest France a même signalé les caprices des stars, entre suites quatre étoiles et limousine en passant par les amplis Fender préférés de Chuck.
Toujours est-il que le schéma est plutôt exceptionnel : les trois derniers pionniers du rock sur le même plateau, presque en même temps dans un village de Bretagne.
Finalement ce sera un combat de logue haleine toute la journée pour les voir gravir l'escalier de la grande scène. Jerry Lee Lewis, encore habitué aux concerts, est le premier à arriver, en petite limousine noire, et monte sur scène sans trop de difficultés. Le rockeur est voûté, peine à marcher mais il semble toujours vaillant et reste aussi efficace au piano et au chant.
Dans les coulisses, difficile de comprendre ce qui se passe. Un organisateur va chercher la limousine de 10m de Little Richard perdu au McDo de Quévert tandis que Chuck Berry reste enfermé au volant de sa voiture. Les discussions sont difficiles mais tout finira bien. Little Richard monte sur scène, se fait siffler pour avoir fait sortir un caméraman mais relit ses classiques avec brio.
A la fin de sa prestation, Chuck Berry s'approche du piano avant de démarrer son concert qui sera le plus énergique des trois. Souriant, sympathique, blagueur, il finira même son show avec Jean-Louis Aubert pour un joli moment de la soirée.
Ce fut difficile, les trois n'ont pas joué ensemble, mais l'équipe des organisateurs a réussi le pari. Unique en France, les trois pionniers étaient réunis dans la ville du rock !
La légende française : Bon le titre est exagéré, il n'était pas le seul, n'est pas le plus connu mais tout de même ! En remplacement d'Elmer Food Beat malheureusement annulés, c'est Dick qui va compléter la soirée déjà bien chargée.
Dick, oui, le niçois, Dick Rivers, un des pionniers du rock français avec Johnny ou monsieur Eddy. Toujours est-il que Dick propose un florilège de ses chansons devant un public parsemé, retenu sur la grande scène à cause des retards des américains.
Du bon rock classique et des mélodies que l'on connaît bien chantées par un Monsieur du Rock'n'roll.
Les antisociales légendes : Ce fut une aventure difficile, riche en rebondissements mais ils ont réussi : faire retourner l'équipe de Trust dans leur salle de répétition pendant quelques mois pour offrir au public de Bobital (et au public français puisque le concert devrait sortir en DVD) un concert unique du groupe le plus emblématique d'une époque.
Le résultat est plutôt réussi même si on peut sentir un petit manque de temps pour roder le show ainsi qu'une petite absence d'ambiance dans le public.
Bernie peine à prendre ses marques et semble un peu stressé.
Le show prendra de l'ampleur au fil du temps mais les fans, qui n'espéraient certainement plus réentendre ces classiques en live, ne donneront malheureusement guère plus de voix.
Depuis le temps qu'ils espéraient...
Voilà pour les légendes dans une soirée qui restera sûrement marquée d'une pierre blanche dans la vie de ce festival.
Comment aller plus loin et faire une thématique encore plus intéressante sans user et abuser (et se ruiner dans) d'énormes têtes d'affiche actuelles ?
Aux organisateurs de nous dénicher une autre aventure pour l'année prochaine. Le pari était osé, il a été joliment réussi avec une journée exceptionnelle et des spectateurs comblés.
|