Une rentrée à Paris en septembre, c'est toujours une course à la réadaptation. Aux métros, la course des escalators, le bruit des pas pressés sur les trottoirs, et les concerts en conclusion des journées trop courtes.
Après l'orgie des festivals estivaux, même la scène du Nouveau Casino semble petite et dérisoire, lorsqu'on a connu la folie des grandeurs du Benicassim Festival.
Bref. La rentrée s'amorce ce soir avec l'une des rares dates attrayantes de ce mois de septembre, puisque le duo parisien qui monte, Mai, ouvre pour la nouvelle signature de PIAS/Warp, Grizzly Bear, quatuor New-Yorkais ayant déjà illuminé la Route du rock avec leur folk expérimental.
Mai tout d'abord, repose la salle, étonnamment remplie pour une soirée de rentrée, avec son folk mi-suédois mi-français, entre indie Ikéa (Johanna Wedin au chant et au piano) et pop-songs Castorama (Dorian Dumont, guitares). Des mélodies faciles à monter et pourtant très agréable à l'utilisation, portée par la douce candeur de "Like in a film" et ses dérapages instrumentaux.
Visite au pays d'Alice au pays de la pop Indéniablement, la beauté fragile de Johanna joue pour le groupe, visage d'Anita Pallenberg et voix chaude comme un geyser.
Les compositions, sans être géniales de génie, transportent l'auditeur l'espace de quelques minutes, et la basse très Air de "Like in a film" d'embraser l'oxygène. Un "Flicka" chanté en duo plus loin, l'auditoire est totalement converti, malgré les quelques langueurs des titres les plus longs, joués sans ruptures et digressions. Peut-être à mi-chemin entre la pop orchestrale de Nick Drake et la froideur organique de Nico, toutes proportions gardées.
To be confirmed anyway...Le duo, présent sur la compil avec son single "En fait", devra encore patienter un peu pour la consécration.
Grizzly Bear et ses physiques improbables attend son heure patiemment, prêt à griffer avec ses pattes en pop psyché.
Et l'on se remémore le concert de Saint Malo, haut en lumière.
Les quatre de New-York, premier folkeux à signer le légendaire label de Warp, distribuent d'entrée un "Knife" mordant et rageur, en offrant toujours ce jeu de voix angéliques entre Daniel Rossen et Ed Droste.
Sans oublier l'énorme contribution de Chris Taylor tantôt à la basse, à la flûte, au micro... "Y a-t-il des gens ici qui étaient à la Route du Rock?" demande Daniel Rossen, quelques index se lèvent, et Daniel d'ajouter "C'est un festival étonnant". On confirme.
Le gang de Brooklyn ne tarde pas à imposer son somptueux mélange de folk, d'electronica et de rock californien devant la foule médusée par tant d'influences.
Fatalement on plonge des deux bras dans "Easier", simple comptine prétexte au chant d'Ed avec la richesse d'accompagnement que seul un groupe ayant été bercé par Crosby Stills & Nash peut retranscrire à la perfection, entre banjo et roulements de batteries quasi militaires.
Et "Lullabye" achève de convaincre que Grizzly Bear maîtrise parfaitement l'art des ponts et des Ad lib, parties de guitares sublimes, aériennes et légères. Chantant comme un seul homme, le groupe étonne par sa totale maîtrise du live, puis embraye sur "On a neck on a spit" avec un folk tout droit sorti de la ferme quatre étoiles...
Une excellente surprise de rentrée, qui obligera l'auditeur à réécouter Horn of plenty, le premier album.
La grande surprise du live reste sans doute cette capacité à faire du lumineux avec du sombre, comme ce "Colorado" débuté sur un air dépressif, se dirigeant lentement vers la lumière avec un choeur que Dieu lui-même n'aurait pas renié. La tête bascule, la tête ferme les yeux, on chavire.....
Et on se prend une baffe dans le tympan avec l'inédit jouée ce soir, gros mélange melting pot de disco, folk et pop.......Gare au Grizzly......
Les lumières se rallument, et l'on apprend que Tom Brosseau assurait le début du concert avant Mai. On s'étouffe on s'étrangle d'avoir raté l'américain....
Peu importe, la saison musicale ne fait que commencer et Grizzly Bear reste malgré tout l'excellente révélation de ce mois de septembre en été indien. |