Lyes Idres, un nom original pour un auteur dramatique singulier. En 2006, il a écrit, monté et mise en scène "L'antre-jambes", pièce sombre mais haute en couleurs littéraires, qui a connu un beau succès tant auprès des critiques que du public. Après le Théâtre des Déchargeurs, elle sera à l'affiche du Théâtre Côté cour jusqu'au 21 janvier 2007.
Rencontre avec un jeune homme réservé qui a un beau brin de plume.
Vous êtes comédien, auteur dramatique, metteur en scène et vous avez également un cursus universitaire littéraire sur l’histoire du théâtre. S'agit-il d'un parcours naturel faisant suite à une vocation précoce ou le résultat de circonstances accidentelles et de rencontres ?
Lyes Idres : Surtout par accident. Même le théâtre. Je n'avais jamais pensé faire du théâtre. Au départ, le théâtre était plutôt une thérapie car j'étais assez timide et réservé. Et puis j'ai été contaminé. J'ai continué et même joué un peu. Je me suis ensuite inscrit au cours Florent et là mon intérêt a faibli.
Le cours Florent a simultanément une très bonne réputation et une certaine réputation.
Lyes Idres : Je dirai que le cours Florent a une très bonne réputation et est une très mauvaise école. En revanche, j'ai suivi les cours de Dominique Viriot qui étaient excellents. Je me suis aussi rendu compte que je ne m'arrivais pas à travailler avec les autres comédiens. Je trouvais cela amusant mais sans pouvoir m'investir dans un rôle. Je me suis alors orienté vers l'écriture. Si je ne peux être la marionnette je peux peut-être être marionnettiste ce qui est plus intéressant.
Vous avez écrit un roman "Du crétin à la bergère".
Lyes Idres : Oui mais j'ai commencé par des textes de chansons. L'écriture dramatique est venue beaucoup plus tard.
Deux pièces à votre actif. "L'antre-jambes" qui nous permet de nous rencontrer et "Les plus vieilles mouches". Cette première pièce a-telle été jouée ?
Lyes Idres : Non parce que je n'avais pas de distribution. Cela nécessitait aussi des moyens plus importants que "L'antre-jambes" en raison d'un décor un peu plus conséquent mais aussi parce que les rôles impliquent des acteurs plus âgés qui auraient dû être payés. "L'antre-jambes" résulte de ma rencontre avec Alexandra Sallé que j'ai connue au cours Florent, et c'est bien la seule chose qu'il m'ait apporté. Elle m'a lancé sur ce projet d'écriture parce qu'elle avait envie avec deux autres comédiennes de jouer une pièce sur le thème du cabaret.
Parlez-nous un peu de cette pièce.
Lyes Idres : J'avais envie de me faire plaisir pour cette écriture et d'écrire quelque chose de beau. Je l'ai situé dans les années 50 parce pour utiliser un vocabulaire un peu ancien, l'argot, la verve d'Audiard que j'aime beaucoup. Et puis j'avais la chance d'écrire pour trois belles filles ce qui m'a aussi inspiré pour les déshabiller tout en abordant des propos plus sombres. C'est le décalage qui m'a amusé. Je voulais aussi utiliser des termes unisexes et un cynisme unisexe également. Je suis un grand amateur d'humour noir.
L'univers de cette pièce est plutôt grave et glauque.
Lyes Idres : Moi je me suis beaucoup amusé à l'écrire car pour moi c'est une comédie. Mais les réactions du public peuvent être très différentes du rire à l'émotion.
Vous avez également assuré la mise en scène. Pour quelle raison ?
Lyes Idres : Par facilité mais aussi parce que je voulais me colleter à la mise en scène. Et puis lors de la phase d'écriture, une écriture qui revêt un caractère cinématographique, j'avais vraiment des images en tête donc il me paraissait logique de faire la mise en scène.
Et cette expérience s'est mieux déroulée que celle d'acteur ?
Lyes Idres : Oui, cela m'a vraiment réconcilié avec le théâtre.
Les comédiennes ont-elles été surprises à la découverte de la pièce qui certes part du thème qu'elles avaient souhaité mais qui va bien au-delà ?
Lyes Idres : Oui, je pense qu'elles s'attendaient à quelque chose de plus classique. Mais c'était une surprise plutôt agréable. En fait, les personnages sont plus âgés qu'elles.
Mais en même temps leur jeunesse est source d'une grande fragilité qui crée un décalage.
Lyes Idres : Au final, elles ont apporté une vraie sensibilité aux rôles et font décoller le texte avec humour.
"L'antre-jambes" a été d'abord jouée au Théâtre des Déchargeurs puis maintenant au Théâtre Côté Cour.
Lyes Idres : Nous avons fait 30 dates aux Déchargeurs et nous en ferons à peu près 30 également au Théâtre Côté cour jusqu'au 21 janvier 2007.
Quel est le bilan de cette première expérience à titre personnel, par rapport à votre écriture, et pour le spectacle ?
Lyes Idres : Pour moi le bilan est forcément positif. J'ai envie de continuer dans le théâtre. J'ai été très heureux de jouer avec ces comédiennes. Elles seront au centre de mon prochain projet d'écriture et je m'écrirai sans doute un rôle. Pour le spectacle, sans parler de rentabilité, nous avons eu de bonnes critiques des professionnels et de très bons retours du public.
Les projets ?
Lyes Idres : Pour 2007, c'est essentiellement d'essayer de faire tourner le spectacle en province. Nous avons réalisé un DVD du spectacle, avec une captation et un vrai montage, qui nous l'espérons pourra permettre de l'apprécier et éventuellement de reprogrammer la pièce en 2008.
Et l'écriture ?
Lyes Idres : J'ai plusieurs projets en cours et je m'astreins à écrire tous les jours.
Dans le même registre que "L'antre-jambes "?
Lyes Idres : Non. Même si certains thèmes sont récurrents. Mais j'aime bien mélanger les époques, les genres et les écritures.
Allez-vous au théâtre ?
Lyes Idres : Je vais très peu au théâtre et au cinéma. Je lis très peu. Je suis plus attaché à la création. Ce n'est pas la crainte d'être pollué par les autres mais en réalité je m'ennuie souvent. Et quand je lis ce sont des auteurs classiques. Je peux quand même dire que je suis un grand admirateur de Bertrand Blier, de Chabrol, de Mocky du début.
Pour vous le metteur en scène doit être au service du texte ou se servir du texte pour fonder sa propre création ?
Lyes Idres : J'ai fait la mise en scène de mon propre texte et je ne pense pas que je me serai aventuré à faire la mise en scène du texte d'un autre. Ce qui m'importe c'est le respect du texte bien sûr mais aussi de donner aux comédiennes la possibilité de faire des propositions au niveau du jeu tout en cadrant le spectacle. Les jeunes metteurs en scène sans beaucoup d'expérience se comportent souvent en tyrans Un bon metteur en scène doit être diplomate tout en sachant où il veut aller. |