Cabu est à l'honneur ! Avec ses confrères, il investit le Centre Pompidou dans le cadre de l'exposition "BD Reporters" consacrée aux dessinateurs bédéistes qui pratiquent le journalisme reportage et la Mairie de Paris lui rend hommage avec sa première exposition personnelle "Cabu et Paris".

Cabu a débarqué à Paris il y un demi siècle pour, dit-il, "vérifier que les parisiennes étaient bien comme dans les dessins de Kiraz" et a commencé par dessiner des étiquettes de camembert. Il est tombé en pâmoison pour la capitale et lui est d'une fidélité exemplaire puisqu'il avoue en être toujours amoureux.

Si Paris a bien changé depuis son arrivée, et à ce titre ses dessins constituent une iconographie inestimable, lui pas. Il porte toujours ses petites lunettes rondes, sa coupe à la Stone.

Bon les cheveux sont parsemés de quelques fils argentés, la dioptrie s'est sûrement aggravée mais il a conservé son allure et sa voix de jeune homme, l'œil est toujours plein d'humour et le trait impertinent. Son trait n'a guère changé non plus.

Arpenteur du bitume, nez au vent, crayon à la main, rien ne lui échappe et aucun aspect de la ville ne le laisse indifférent. Cabu c'est un sens aigu de l'observation, l'art du croquis instantané, du trait qui fait mouche, du portrait satirique, mais aussi de la bulle et de la légende lucide et pleine d'humour, un humour impertinent et farceur, qui prennent le tour de vrais traits d'esprit.

Et comme Cabu est un dessinateur de presse, tous les registres sont abondamment illustrés : caricature politique, croquis de spectacles, chroniques de la vie quotidienne. Le thésaurus du Doisneau de la plume couvre l'ensemble des événements de la cité de quoi construire une exposition riche en thématiques.

L'Agence Pylone avec le graphiste d'intérieur Thierry Gourdin, a élaboré une scénographie sobre et tamisée pour présenter les planches originales, les collages de dessins de presse, les carnets de croquis ainsi que les coupures de presse et les photographies appariées selon six thèmes déclinés autour de Paris : le patrimoine, la rue, la Seine, les pouvoirs, la scène et

Les planches originales présentées constituent une vraie cartographie illustrée de la capitale en retraçant son évolution, avec ses transformations et ses pérennités et donc un thésaurus inestimable d'autant qu'il est commenté et croqué avec jovialité.

Car Cabu c'est 50 ans de dessins au quotidien et du quotidien. Un dessin est même intitulé "5971 rues à Paris".

La saga des arrondissements

Par ailleurs, spécialement pour cette exposition, Cabu a croqué les 20 arrondissements parisiens.

Un dessin suffit à restituer l'ambiance de l'arrondissement ce qui manifeste d'une part la grande connaissance de Paris mais aussi son don de synthèse.

Ainsi, par exemple, le 17ème, arrondissement assez terne (sic) et peu animé (re-sic), est représenté par le cimetière des Batignolles coincé près du périphérique avec ce commentaire "déjà l'enfer..."

L'Opéra Bastille est bien évidemment épinglé et Cabu d'ajouter lalégende suivante : "Et si les filets de protection servaient de hamac aux SDF ?"

Paris : de la Seine à la scène

Paris c'est d'abord la Seine avec ses quais et ses réverbères.

Artiste, Cabu s'intéresse à l'art et il a été dessinateur pour la rubrique Paris-Presse l'intransigeant ce qui lui a permis géalement de mettre son grain de poivre à gratter dans le domaine culturel.

Les 3 P : Paris Patrimoine et Pouvoirs

Cabu croque les monuments parisiens avec une plume acérée quand il s'agit de certaines réalisations contemporaines.

Par ailleurs, il a eu sa chance en la personne de Cavana qui l'a engagé à Charlie Hebdo. Dessinateur également dans Hara Kiri et le Canard Enchaîné, il tâte avec succès et acuité du dessin politique.

Un regret peut être, dans cette exposition strictement limitée à la ville : l'absence de vitrine dédiée aux habitants permanents ou occasionnels de Paris. Car même si on les aperçoit sur les dessins, les fameuses Parisiennes de Kiraz à la Cabu et les touristes, comme les croquignolettes Japonaises qu'il aime tant dessiner, auraient formé une bien belle galerie de portraits.