On dit parfois, exagérément, de certains artistes que même s'ils chantaient l'annuaire téléphonique d'un quelconque pays, nous les aimerions encore et on en redemanderait comme á la première heure.
Brett Anderson est incontestablement de ceux là. Et quand je dis incontestablement c'est aussi parce les réfractaires sauront, eux aussi, identifier le garçon quelque soit son registre.
Avec ce premier album solo, et dès les premières secondes, on est réconforté. Le charismatique chanteur des défunts Suede est toujours le même. Voix aussi maniérée qu'envoûtante, aussi chaleureuse et poignante que douce et sirupeuse. Une voix qui á elle toute seule divise.
Suede, ce dernier jeune dinosaure de la brit pop, qui aurait pu être les Smiths à la place de Morrissey, ou l'inverse, et qui, au final, n'a pas vraiment su gérer le bug de l'an 2000, le retour du rock garage, une jeunesse qui inhume les stars du rock d'un autre temps et crache sur ses contemporains. Suede c'est aussi des egos trop grands pour ces frêles personnages dans lesquels ils étaient prisonniers, c'est un guitare héros mort-né (Bernard Butler) et un chanteur messianique trop glamour.
Et ce n'est pas la tentative de réconciliation des deux anciens ados le temps d'un album sous le nom de The Tears passé, sans surprise, inaperçu, qui aura changé grand chose.
L'idole ainsi déchue, revient aujourd'hui en solo donc et avec un album sans titre, flanqué d'une photo de pochette pas glamour du tout, montrant Brett dans son environnement naturel, et nous, curieux auditeurs, fans, ou simples badauds, on est là de l'autre côté du grillage, en train de lire la plaquette informative á propos du bestiau...
Pathétique ? Peut être pas car cet album, même s'il n'est pas parfait, signe un beau retour, et tant pis s'il est trop discret, de notre beau héros, en vrai rock star, n'en déplaise aux tabloïds friands de teenager amoureux de dope et de top modèle !
A l'image du titre d'ouverture "Love is dead", l'album déroule une suite de chansons dont l'atout principal reste tout de même la voix de Brett Anderson qui n'a pas pris une ride. Parfois, cela frôle l'indigestion de trémolos, l'overdose de maniérisme mais pourtant le charme opère.
Pas aussi bien qu'avant peut être, ainsi, malgré qu'elle ne laisse pas indifférent, "Scorpio Rising" n'est pas aussi poignante que "Sleeping pills" par exemple.
Musicalement, si on se rapproche de Suede, on est ici dans un univers moins énergique, plus axé sur la douceur et la mélancolie. Là aussi, on évite de justesse les écueils indigestes des violons et des chœurs, et une fois encore on est surpris d'y échapper.
Souvent touchant, ce disque est à placer sans honte auprès de ses prédécesseurs. L'album du renouveau d'un artiste qui, certes, est descendu de son piédestal il y a quelques années mais qui, tout ego mis de côté, pourrait bien avoir retrouvé un second souffle et voir les plus beaux moments de sa carrière dans le futur plutôt que dans le passé.
Certaines rock stars vieillissent bien … profitons en ! |