Après avoir été excitant (Tom McRae, 2000), inégal (Just like blood, 2003) puis décevant (All maps welcome, 2005), Tom McRae se fait navrant. Pour son quatrième album, l’horriblement quelconque King of cards, l’ancien plus prometteur des jeunes auteurs-compositeurs-interprètes anglais, échoue sa belle voix dans un marasme de complaintes insipides et sirupeusement pop, ressassant sans inspiration un univers aux couleurs devenues ternes.
Que l’on ne s’y trompe pas : ce n’est pas par plaisir ou sadisme que le chroniqueur s’épanche ici avec plus de verve qu’il ne convient contre un album qui a tout au moins pour lui le mérite d’une production impeccable (gage du sérieux e l’entreprise et du respect témoigné à l’auditeur). Il est même pénible, après avoir tant aimé ce timbre si particulier, ce chant mature, ces compositions aiguisées et souvent originales, de n’avoir que du mal à dire d’un album que son auteur voulait le plus abordable de sa discographie. On aimerait tant aimer… Mais l’on aura beau essayer, tout au long de ces trois quart d’heures, de trouver de quoi racheter l’ensemble, on n’y parviendra pas. La magie n’est plus là, tout simplement, quoique les recettes soient appliquées - avec peut-être trop d’application, précisément. L’ensemble sonne faux, trop propre sur lui, artificiel, poussif. Une belle voix qui n’aurait plus rien à chanter.
On espèrera pourtant assez souvent retrouver quelques frissons, un seul même. Mais cela ne durera guère plus de quelques secondes - un dizaine avec "Deliver me", prometteur jusqu’à ce qu’il se montre dans toute son inefficacité d’auto-plagiat discipliné ; un trentaine avec "Lord How long ?", le temps d’espérer un belle apesanteur, avant de retomber dans le néant de la chansonnette gentillette. Ne se dégagent que "On and on" et "Keep the picture clear", à vrai dire les seuls titres intéressants de l’album, qui ne suffiront pas à eux seuls à sauver King of cards de l’enfer du bas de la pile de CDs.
Dans son roman "Haute fidélité", Nick Hornby se demande par l’intermédiaire de son personnage principal si l’on est triste parce qu’on écoute de la musique pop (au sens large du terme) ou si l’on écoute de la pop parce qu’on est triste. Sans trancher l’épineux dilemme, il est clair que la tristesse (ou "mélancolie", ou "regret" ou autre nom qu’on lui préfèrera) et la musique pop sont bien liées dans l’esprit de beaucoup d’auditeurs. Il reste alors tout au moins à espérer que, pour proposer un quatrième album aussi peu inspiré, Tom McRae ait trouvé le bonheur. Il ne lui resterait alors qu’à abandonner la musique pour quelques temps. |