Eric Bling c'est un gaucher qui joue de la guitare de droitier avec plein d'autres trucs ! Des trucs qui tapent, des trucs qui soufflent, des trucs qui enregistrent les trucs qui tapent et qui soufflent …
C'est aussi une voix qui va se loger du côté des Amériques, quelque part entre les mélodies sexy de Leonard Cohen et le blues déchirant de Calvin Russell ou même, si on osait remonter 100 ans en arrière, celui de Robert Johnson, légende du blues.
Mais les chansons de Eric Bling tiennent autant du blues que de la pop, ou plus exactement du songwriting, comme on dit de la pop américaine … car il suffit d'écouter des titres comme "Loves N Troubles" pour se rendre compte que non seulement Eric Bling sait faire passer à lui tout seul l'émotion du blues, sans artifice, mais il sait aussi composer des sacrées bonnes chansons.
En effet, plutôt que de faire couiner sa guitare jusqu'à plus soif et postillonner comme il se doit dans son harmonica, le garçon accompagne le tout de textes touchants, à la voix parfaitement posée et maîtrisée sans pour autant être impersonnelle et sans émotion, bien au contraire.
Sur "I am Positively sick", on retrouve une ambiance à la Kat Onoma dont Rodolphe Burger a le secret. Un beau moment, noir et oppressant mais de si belle manière que l'on y revient toujours. "Wood guitar" fait le grand écart et si l'ambiance est aussi oppressante, on se retrouve au milieu d'une sorte de trip hop improbable, comme si Morcheeba avait fait du blues. Superbe. Superbe aussi l'enchaînement sur ce "Loves N troubles" vers lequel on revient décidément comme attiré par un aimant !
Les délicates strates sonores de guitare, basse, harmonica entremêlés sur le morceau d'ouverture "The Gran Rail road" pourraient de toute façon légitimer l'existence de cet album. Viscéral, habité, sensuel…
What's nu vous réconciliera avec les hommes orchestre, à n'en pas douter, et avec le blues, assurément. Nick Cave (l'ambiance de "What's nu" n'est pas sans rappeler les ambiances noires des Bad Seeds) n'a plus qu'à bien se tenir ! |