Monologue de et par Susana Lastreto accompagnée au bandonéon par Annabel de Courson.
Susana Lastreto est d'origine argentine. Cliché que de parler de l'âme argentine. Et pourtant. Elle est bien là dans cette divagation mnémonique, poétique et autobiographique, qu'est "Nuit d'été loin des Andes".
Susana Lastreto est vivante et bien vivante, elle monte sur scène avec sa valise qu’elle a posée en France, ou plutôt en Gaulle. Chez le dentiste, pour soigner une dent qui bouge et voilà que pointe le nez "le raton perez", la petite souris argentine, qui dépose une piécette en échange de la dent de lait.
Et là voilà submergée par des bouffées de souvenirs. Elle évoque l’enfance heureuse mais aussi les déboires et les désillusions de l’exil, le souvenir de ceux qui sont restés là-bas, le viellissement et la mort des parents, la "disparition" de la petite sœur, avec cette petite musique du cœur à l’accent chantant unique, le chant des racines celles que l’on n’oublie jamais et qui vous tiennent chaud au cœur quand vient la mélancolie.
Elle soliloque, s’amuse des travers des gaulois, égratigne tous les pouvoirs, et aborde des questions souvent graves ou sombres par le biais de la métaphore édifiante (la plante qui refuse que le chat assoiffé boive son eau), de l’humour noir (la canicule qui a fait le baisser le taux de chômage grâce au boum des emplois de pompes funèbres) ou du sophisme (dans un pays où les poubelles sont pleines, il n’y a pas de gens qui meurent de faim).
Susana Lastreto, la comédienne, nous entraîne dans des sommets de poésie ou d’émotion qui submergent par vagues. Son écriture est faite de chair, de sang et de larmes mais tissé dans une toile aux couleurs vives. Son chat joueur de bandonéon, incarné par Annabel de Courson, ne s'appelle-t-il pas Espé, diminutif de "Espere en un futuro mejor"...
Sous les auspices de ses montagnes de la fameuse cordillère, la petite princesse regardait le monde avec de grands yeux innocents et affamés et l’esprit empli de l’univers des contes de fées. Elle croît en son destin, un destin extraordinaire qui l’entraîne à traverser l’océan pour atterrir à Châtelette dans une méchante chambre de bonne.
Et ce destin extraordinaire va se réaliser bien sûr, non pas de manière matérielle, ni même amoureuse (ah, le voyage de noces à La Baule), mais en étant là ce soir, sur scène, avec le public, en étant comédienne, le plus beau métier du monde.
Magique comme une bulle de savon aux couleurs multiples et irisées, ce spectacle savant dosage de drôlerie, de poésie et d'émotion, ravit le coeur. |