Inutile de revenir longuement sur la carrière de Robert Wyatt. Du prog rock de Soft Machine au Comicopera de ce vieil ours anglais, tout le monde connait le personnage.
Discret, voire secret, il ne montre pas souvent le bout de son nez, si ce n'est lors de quelques indirectes collaborations avec des artistes de tout bord, ou de rares albums, dont celui est le dernier en date et qui, une fois de plus, ne sera pas défendu sur scène.
Pourtant, il aurait fier allure cet opéra d'opérette avec ses décors naturels de jazz, de bossa, de pop et même de folk ! Le tout passé à la moulinette Wyatt.
On imagine déjà la distribution d'un tel projet, un tas de chanteurs morts qui reviendraient taper le boeuf avec quelques valeurs sûres de moins de 30 ans. Ca donnerait sûrement un chouette truc comme sur "Be serious", sorte de jazz blues qui swingue tout en douceur et nonchalance, mine de rien. On verrait bien Leonard Cohen jouer le crooner de "Just as you are" et David Sylvian s'approprier "You you".
Inévitablement, il faudra supporter au milieu de cette débauche de belles mélodies l'inévitable morceau disons ... Revival. Façon "quand j'étais jeune j'étais un hippie et je faisais de la musique pour les étoiles que j'aimais à observer du haut du killimanjaro".
C'est "Mob rule" qui s'y colle en enchainant sur le déjà bien étonnant "On the town square" aux accents un peu calypso qui vire chant a capella... un peu chiant quand même. Beaucoup plus en tout cas que le non moins mystique "Out of the blue" lui aussi sorti, dirait-on, d'un rêve éveillé passé à côté de son enveloppe corporelle habituelle. Titre qui rappelle un certain David Bowie à une époque révolue.
C'est d'ailleurs ce qui fait beaucoup de l'intérêt de ce disque. Contrairement à d'autres papies du rock, Wyatt a su garder le cap sans céder aux tendances et aux modes. Wyatt restant toujours lui-même, brouillant les pistes entre pop frôlant le easy listening et morceaux plus ... ennuyeux (?) comme "Pastafari".
On pourra être plus réservé aussi sur les quelques titres chantés en espagnol (pure question de goût personnel ceci dit). Même si ce "Hasta siempre commandante" qui nous prend à contrepied à la fin du disque est réussi, il semble en réel décalage avec la première partie du disque. Mais après tout, dans un opéra quand bien même comique, tout peut arriver. Viva la revolucion !
Après ces 16 titres, on ne peut que se rendre à l'évidence. Wyatt est toujours Wyatt, plus riche de 40 ans d'expérimentations sonores et musicales. De quoi encore surprendre et réjouir. Brian Wilson doit être bien jaloux.
Alors tentez l'expérience, mettez cet opéra dans votre chaine hifi...
Installez-vous bien au chaud et laissez-vous bercer par ce joli disque. |