Sous le commissariat d’Hervé Mikaeloff, l’Espace Louis Vuitton a invité onze artistes russes à créer une oeuvre originale, in situ, sur les lieux mêmes de leur future exposition, "Moscopolis" sur la thématique de la ville de Moscou, la métropole d’Europe la plus étendue, qui connaît une période de profonde mutation urbanistique
Onze artistes qui travaillent à Moscou et plus particulièrement dans le Centre d'art contemporain de Winzavod qui a pris ses quartiers dans une usine à vins désaffectée à l'initiative d'Oleg Kulik.
Onze regards sur l'identité de leur ville qui tentent de saisir l'instant.
La nostalgie de l'âme russe
Nostalgie pour Alexandre Brodsky avec sa nature morte poétique, "Le coucher de soleil sur la rivière Youaza". L'enfant qu'il était ne reconnait plus dans le torrent de détritus la rivière dans laquelle il péchait.
La ville sans les gens. Sauf pour deux d’entre eux, deux femmes. Olga Chernysheva expose des portraits photographiques des employés du métro moscovite que l’on dirait extraites d’un album des années 50 et, à rebours, Ksenia Pertrukhina fustige l'uniformisation en reconstituant la première parade filmée par replication d'un seul personnage.
Nostalgie aussi d'une certaine manière pour Valery Koshlyakov dont les baches peintes au gourdron témoignent de la métamorphose permanente d'un phenix urbain où se superposent et se fondent les vestiges de la cité.
La translation utopiste
Pavel Pepperstein, propose de muséifier Moscou et de créer une ville totalement nouvelle, placée sous la protection légendaire de la traditionnelle babouchka, érigée en centre de défense aérienne, et articulée autour des icônes de l’art russe de Kandinsky à Malévitch.
Le groupe Iced Architects suggère d’inverser les constructions avec ses corescrapers stalactites pour une "New Moscow" radicalement souterraine.
Une réalité fragile et contingente
Stanislav Shuripa voit une ville insaisissable et fragile.
Les immeubles ne sont pas plus que des feuilles de papier soumises aux aléas du temps et une camera filme leur effondrement inéluctable.
Ce qui suscite un récit inquiet pour Valery Chtak qui couvre les murs de cryptogrammes urbains qui revêtent un caractère kabbalistique.
Alexeï Kallima, qui s’expose actuellement à la Galerie Anne de Villepoix et est présent à l’exposition "Sots Art" à la Maison Rouge, propose une fresque fluorescente qui occupe les quatre murs d'une pièce obscure pour une étrange immersion dans sa ville.
Pour Kirill Chelushkin, la capitale moscovite, placée sous berceau des "sept soeurs", les fameux gratte-ciel staliniens, n'est qu'un mouvement perpétuel.
Aussi sur la sculpture en polystyrène sont projetées en accéléré des images d'un incessant trafic.
Quant à Oleg Kulik, toujours imprévisible et provocateur, il a apporté une yourte mongole ! |