Comédie dramatique d'après Blaise Pascal, adaptation de Bruno Bayen et Louis-Charles Sirjacq, mise en scène de Bruno Bayen, avec Thomas Blanchard, Grétel Delattre, Guillaume Gouix, Mathias Jung, Florence Loiret-Caille, Jean-Baptiste Malartre, Juliette Bayen et Meret Graffenried (en alternance).
Inspiré tant par le fond que par la forme des fameuses lettres de Pascal, "Les provinciales", Bruno Bayen y a trouvé matière pour concevoir, en collaboration avec Louis-Charles Sirjacq, une comédie dramatique basée sur une histoire politique.
L'histoire politique est celle du conflit qui opposa les jansénistes et les jésuites, pendant la seconde moitié du 17ème siècle, avec pour enjeu la domination idéologique de l'Eglise mais aussi, bien évidemment, la lutte pour le pouvoir temporel.
Pascal, mandaté par les jansénistes, traite dans ce pamphlet épistolaire de la morale et de la politique prônées par les jésuites qui tendraient essentiellement à un laxisme opportuniste illustré par la sentence suivante : "Peu importe que la société soit remplie d'abominations si nos églises sont pleines de monde".
Bruno Bayen et Louis-Charles Sirjacq ont conçu une comédie philosophique dans laquelle un jeune auteur mène l'enquête pour se forger une opinion sur cette querelle de théologiens. Une querelle menée par des érudits qui détiennent le savoir et maîtrisent l'usage de la parole, outil de propagation des doctrines, aujourd'hui comme par le passé. Bruno Bayen, qui officie également à la mise en scène, signe un spectacle efficace de belle facture.
Dans une scénographie singulière, conceptuelle et ludique, du succès littéraire, mondain et populaire rencontré par ces lettres, qui supplantent même "Clélie", le roman galant, publié en épisodes, de Madame de Scudéry, à leur mise à l'index, en passant par la narration du miracle de la Sainte-Epine opéré sur la propre nièce de Pascal, pensionnaire au bastion janséniste de Port Royal, le jeune E.A.A.B.P.A.F.D.E.P. (Et Ancien Ami Auvergnat Blaise Pascal Fils d’Etienne Pascal) sonde habilement le jésuite. Thomas Blanchard et Jean-Baptiste Malartre sont tous deux excellents.
Qu’il s’agisse du débat sur les principes majeurs des enseignements jansénistes comme le "pouvoir proche", sur la doctrine de la probabilité ou les maximes de la casuistique pratiquée par les jésuites, la confrontation, qui implique une écoute attentive et relativement éclairée, est jubilatoire et riche d'enseignements.
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