Drame de Shakespeare, mise en scène de Jean-Luc Jeener avec Philippe Desboeuf, Dimitri Fornasari, Marine Gandibleu, Lisa Sans, Thierry Garet, Luc Baboulène, Cédric Grimoin, Jérome Keen, Hugues Baronie, Damien Carlot, Tom Costalino, Franz Debrebant, Maud Imbert, Gérard Levoyer, Philippe Naud et Niels Revilliod.
Dans le cycle Shakespeare du Théâtre du Nord-Ouest, Jean-luc Jeener présente "Le roi Lear" en version intégrale. Une représentation de cinq heures pour interroger la condition humaine et narrer l'aveuglement des hommes qui ne savent pas déceler "la vérité [qui] est un arbre perdu au milieu des faux semblants" et reconnaître le vrai amour filial.
Le roi Lear, l'âge venu, décide de soustraire sa vieillesse aux sujétions du pouvoir pour méditer sur les mystères de la vie. Mais il souffre d'une stérilité spirituelle qui fait de cette méditation espérée, qu'il entrevoit paisible et triomphante, une descente aux enfers passant par la solitude, la folie et la mort.
Car vaniteux, autoritaire, injuste et manquant cruellement de clairvoyance "domestique", "il troque son royaume contre une pension" en partageant son bien entre deux de ses filles, faites de la même étoffe, qui lui feront boire le poison de l'ingratitude, chassant la cadette à l'âme trop pure.
Parallèlement, en symétrie, une autre histoire de famille tragique, celle du comte de Gloucester, autre père égoiste et aveugle, qui bannit son fils légitime, noble et vertueux, abusé par son fils adultère, envieux et fourbe, qui deviendra l'instrument de son châtiment.
Cette fresque furieuse et hallucinée peuplée de fous et d'aveugles, sans effet, sans décor, mise en scène par Jean-Luc Jeener repose sur la qualité d'interprétation, d'incarnation plus précisément s'agissant de théâtre vivant, de tous les comédiens qu'il a réunis.
Impossible de ne pas citer Philippe Desboeuf, doté d'une présence impressionnante et d'un physique hors norme qui renvoie aux temps obscurs des mythes et des légendes, qui donne au roi Lear une dimension à la fois tragique, pathétique et pitoyable face à ses deux filles l'une dans l'implacabilité froide (Marine Gandibleu), l'autre dans la furie furieuse (Lisa Sans).
Les remarquables et apocalyptiques scènes d'errance métaphysique avec son fou, Cédric Grimoin, son conseiller banni Jérôme Keen, et surtout avec Dimitri Fornasari, jeune comédien très prometteur, le fils maudit qui a revêtu l'habit du fou.
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