Texte de Lydie Salvayre, adapté et mis en scène par Laurence Février, avec Laurence Février et
Ahmed Karetti.
A l'heure où les organisateurs de voyages ne savent plus quelles nouvelles destinations extraordinaires proposer aux touristes blasés et avides de sensations fortes, Lydie Salvayre a eu une idée de génie dans son roman "Les belles âmes".
Au lieu des safaris au Kenya, des visites de réserves d'indiens Sioux, de trekking dans l'Ouzbekhistan, de week end chez les Inuits ou de balades humanitaires au Darfour, elle imagine un road-movie excursionnel dans la périphérie des grandes métropoles européennes pour une immersion socio-politico-compassionnelle dans "l'enfer de proximité".
Et roule le bus qui transporte de "belles âmes", rien que du beau monde à l'esprit éclairé, dont journaliste, écrivain, enseignant, de tour en squatt, de Paris à Milan en passant par Berlin, pour un voyage qui va éprouver leur bonne conscience et balayer leurs bons sentiments affichés.
Comédienne et metteur en scène, Laurence Février a procédé à une intelligente, éclairée et pertinente adaptation scénique de ce roman sous forme d'une "mise en voix" à la scénographie originale.
La voix, c'est elle. Son interlocuteur c'est le public à qui elle narre de manière vive, d'une langue ironique qui ne rate jamais sa cible, les épisodes les plus révélateurs des travers, préjugés et hypocrisies de nos contemporains face à la précarité, la pauvreté et l'exclusion sociale. C'est parfois drôle, souvent pathétique, toujours juste et la galerie de portraits, des pauvres comme des nantis, constitue une étonnante fresque épique et satirique.
Des portraits qui, sur fond de toile peinte de tours grises, trouvent leur factotum dans des petits personnages en terre cuite, stupéfiantes caricatures hyper réalistes de notre humanité, réalisés par Cam’s, Marc Buisson, Jackie Dordoni et Jean Paul Mercier, de l’Atelier Marie-Laurencin, atelier de création artistique à visée thérapeutique.
Ils sont manipulés par Ahmed Karetti, danseur et chorégraphe de la Compagnie Hip Jazz Hop, qui use du tissu aérien et assure de magnifiques intermèdes sous forme d'époustouflants solos de danse urbaine. La voix du corps.
Et puis, la voix qui chante, celle de Vic Moan, de la famille de Seb Martel et de Bumcello, scande le spectacle avec des composition syncrétiques, étranges, et totalement enthousiasmantes.
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