Le Goethe Institut propose du 7 février au 29 mars 2008 "August Sander - Hommes du XXème siècle" une exposition sur l'un des maîtres de la photographie documentaire August Sander.

A cette occasion, nous avons rencontré Sabine Belz, commissaire de l'exposition et directrice des manifestations culturelles du Goethe Institut de Paris qui évoque cette exposition mais également l'activité du Goethe Institut.

En liminaire pouvez-vous nous préciser le champ d'action du Goethe Institut qui a pour mission de diffuser et de promouvoir la culture allemande notamment en termes de publics dans la mesure où on pourrait croire qu'il ne s'adresse qu'à des allemands en résidence à Paris ou à un public germanophone.

Sabine Belz : En premier lieu, nous nous adressons au public français et donc pas aux Allemands vivants en France dans la mesure où nous ne sommes pas une organisation pour les Allemands. Notre tâche consiste à travailler pour les Français et avec les Français en composant des programmes qui s'adressent au grand public. Bien évidemment pour les germanophones mais aussi pour tous ceux qui sont intéressés par les manifestations que nous organisons ou auxquelles nous participons sans avoir une connaissance approfondie de l'Allemagne ni parler allemand. En pratique, tout ce que nous proposons s'accompagne, le cas échéant, d'une traduction en français notamment les débats qui se déroulent en traduction simultanée en cas d'interventions en allemand.

Le secteur le plus actif jusqu'à présent est le cinéma. Nous disposons, dans notre maison principale qui se situe avenue d'Iéna d'une salle de cinéma de 200 places dans laquelle nous organisons fréquemment des avant premières avec artiste comme ce fut le cas le 21 février avec la projection du dernier film de Dani Lévy "La vérité vraiment la plus véritable à propos d'Adolf Hitler", qui est un réalisateur juif suisse allemanique connu, qui sortira le 12 mars à Paris et qui est une tragédie pleine d'humour sous une forme de comédie sur Hitler. Nous travaillons en collaboration étroite avec la chaîne télévisée ARTE mais aussi avec d'autres distributeurs du cinéma.

En 2008 nous ferons une grande série sur le Festival international du film documentaire et d'animation de Leipzig en raison de son 50ème anniversaire. Cela concerne les documentaires mais également les films de fiction pour la période d'après guerre jusqu'à aujourd'hui avec tous les bouleversements qui sont intervenus comme mai 68 et la chute du mur de Berlin. Nous avons également une collaboration avec Le Cinéma du réel et les grands festivals. Enfin, nous organisons des rétrospectives. Ainsi en 2007, dans le cadre de "Cinéma du Réel", le festival international du film documentaire au Centre Pompidou, nous avons proposé une programmation complète sur Alexander Kluge. Nous travaillons aussi avec la Cinémathèque Française et le Cinéma de la Danse

En partenariat avec le Centre Pompidou nous avons participé à l'exposition sur Rainer Werner Fassbinder et en décembre 2008 nous participerons, dans ce même cadre, à la rétrospective intégrale Werner Herzog. Et avec le Musée Galliera, en parallèle à l'exposition "Les années folles" nous avons programmé des films avec les mannequins et des films fictions avec des vêtements élégants.

Donc le cinéma est le secteur le plus suivi par les Français qui sont beaucoup plus cinéphiles que les Allemands, les sondages montrant que ces derniers vont une fois par mois au cinéma en moyenne alors que la fréquence est de 2-3 pour les Français. Nous organisons également des expositions dans notre galerie de la rue de Condé et prochainement rue d'Iéna dans des locaux qui viennent d'être totalement rénovés. Ainsi avons nous fait une exposition sur la jeune photographie allemande. Pour les grandes expositions nous agissons en partenariat avec les grands musées comme cette année avec le Jeu de Paume et bientôt avec le Musée d'Art Moderne de Paris.

Vous avez bien voulu nous recevoir à l'occasion de l'exposition August Sander qui se tient rue de Condé du 7 février au 29 mars 2008 qui est un des grands maîtres de la photographie documentaire de la première moitié du 20ème siècle. Quelle est la genèse de cette exposition ?

Sabine Belz : Deux raisons ont concouru à la conception de cette exposition. La première tient à ce que le Jeu de Paume une exposition consacrée à la photographie d'après guerre, "Photographier après la guerre - France-Allemagne 1945-1955" avec une sélection de photographes français et allemands. August Sander figure dans cette exposition mais seulement avec quatre photos qui ne figurent pas parmi les plus connues.

Par ailleurs, comme la dernière exposition consacrée à August Sander a été réalisée il y a 20 ans, j'ai pensé qu'il était intéressant, notamment pour les jeunes générations qui n'ont peut être jamais entendu parler de lui, de montrer une plus grande sélection de ses photos.

La deuxième raison est la tradition. Dans la photographie contemporaine il est bon de se remémorer la photographie de la grande tradition et de l'héritage, qui constitue le socle de fondation dont viennent tous les photographes.

Vous êtes le commissaire de cette exposition comment avez-vous sélectionné les photos ?

Sabine Belz: J'ai pris contact avec la Photographische Sammlung/SK Stiftung Kultur à Cologne qui détient près de 4 000 photos de August Sander et j'ai effectué une sélection avec son petit fils, qui vit en France, à partir des 600 photos disponibles de la série Hommes du XXème siècle.

Vous avez évoqué la jeune photographie allemande. Y a-t-il parmi eux des photographes qui poursuivent la tradition de la photographie documentaire et qui sont en quelque sorte les héritiers contemporains d'August Sander ?

Sabine Belz: Oui, tout à fait. Le plus connu est Wolfang Tillmanns, qui vit actuellement an Angleterre et dont les travaux ont été exposés à la Tate Modern, qui travaille sur l'individu d'aujourd'hui dans son quotidien. Même si l'esthétique est différente, la finalité est la même : établir un fonds documentaire sur une période déterminée. Nous pouvons citer également Thomas Struth qui a réalisé des séries de portraits, sur les jeunes, avec pour finalité de montrer comment vit l'individu aujourd'hui dans un monde globalisé. Donc le fil rouge avec August Sander est toujours vivace.

Comme nous sommes encore au début de l'année, quels seront les événements marquants de l'année 2008 au Goethe Institut ?

Sabine Belz: Nous travaillons sur les années 68 mais dans une approche différente de celle qui consiste à faire des tables rondes avec des personnalités connues. Nous allons organiser, avec mes collègues des centres culturels polonais, hongrois, tchèques et slovaques, une série de films européens car je crois que l'on connaît mal, que ce soit en France comme en Allemagne, ce qui s'est passé dans ces années-là dans ces pays et ce jusqu'à la chute du mur.

C'est une période méconnue et nous avons monté un cycle de films qui seront programmé fin mai au Goethe Institut et nous avons invité le festival de Leipzig. Nous présenterons également des films de l'ancienne RDA qui dans cette période là avait produit énormément de films dans une démarche politique de contre production contre l'Ouest avec l'esthétisme de l'Est et l'idéologie de l'époque. Cette période est intéressante et on peut se demander comment s'est développée l'Europe d'aujourd'hui comptant 27 nations

Tout le monde se souvient des paroles de Martin Luther King "I have a dream" et il y a une exposition organisée avec un des grands journaux allemands avec des people et des personnalités de notoriété internationale, comme Hélène Grimaud, Heidi Klum, Charles Aznavour, Desmond Tutu à qui on a demandé de dire quel était aujourd'hui leur rêve. Il y a donc le rêve et la photo. Ce qui donne une perspective différente sur cette période. Car nous ne souhaitons pas être très orthodoxe sur cette période.

Pour l'automne nous aurons une très jolie et intéressante coopération avec le Musée d'Orsay sur un homme qui fut un vrai européen, et qui n'est pas très connu, Hjarry Graf Kessler, un allemand qui était né à Paris à la fin du 19ème siècle et a été élevé en Angleterre et qui a rédigé des journaux écrit dans les 3 langues. Il était ami de Rodin, Maillol, Bonnard et le Musée d'Orsay organisera un grand colloque européen à son sujet.

A la même période nous ouvrirons avec le Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris cette énorme exposition sur tous les photographes connus de Düsseldorf dont Gerhard Richter et Sigmar Polke. Et je pense que cet évènement fera du bruit !