Comédie dramatique de Serge Valletti, mise en scène de Christophe Correia, avec Jean-Claude Dreyfus et Claire Nebout.
Inspirées du cinéma expressionniste allemand, la scénographie de Patrick Franju et les lumières de Christophe Correia, plantent, sur la scène de la petite salle du Théâtre des Mathurins, un décor distordu qui instaure immédiatement une inquiétante étrangeté.
Une drôle de bicoque que cet hôtel glauque, perdu au trou du cul du monde, dans un endroit où il ne se passe rien, même si, sur un dépliant touristique, la mare aux vaches devient un lac canotable et une ferme délabrée un musée des arts et traditions populaires. Un homme peu ragoutant, à la stature imposante qui passe à peine sous la porte, fait office de réceptionniste.
Il éructe, vitupère, ronchonne, marmonne. Quand arrive un homme en complet veston, tiré à quatre épingles, qui se présente comme VRP venu à la conquête d'un nouveau marché pour des photocopieurs. Et son arrivée n’en est que plus étrange.
Entre réalisme et théâtralisation, Christophe Correia a su interpréter la partition de Serge Valetti qui plonge dans les profondeurs de l’âme humaine, tressant et dénouant les drames intimes.
Le talent de Jean-Claude Dreyfus, plus souple qu’une danseuse étoile lui permet de pouvoir tout jouer de la poésie de Rictus dans "Les soliloques du pauvre" à la farce énaurme du "Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens", pour ne citer que des prestations récentes. Dans "Réception", il trouve un rôle à sa mesure et à sa démesure. Tour à tour répugnant et pathétique, inspirant la compassion comme le rejet, il donne à ce personnage d'homme déchu une réelle humanité.
Face à ce géant, Claire Nebout, dans un double rôle de composition, tient la route et donne une belle dimension à ce huis clos qui, de tensions en pulsions, frise l’onirique cauchemardesque d'un ailleurs près de chez vous. |