Get 27 : c’est l’enfer ! Voilà un slogan qui retranscrirait à la perfection l’impression laissée par le set de Mademoiselle K.
Trois petits morceaux suffirent à nous chasser de l’endroit, abasourdis par la médiocrité de l’orchestre en place. Mauvais à vous rendre durablement mal à l’aise.
Mauvais au point que, par pure sympathie, on souhaiterait voir la chanteuse arrêter ses enfantillages, ses minauderies d’adolescente. Mais avant tout, la voir cesser ses déclarations grotesques d’entre les morceaux. Pour conserver, ne serait-ce qu’un once de dignité… Et si encore la musique arrivait à palier à ces manquements. Mais voilà, l’immense majorité des titres s’avère d’une désespérante banalité, inoffensifs au possible : le rock français dans toute sa monstruosité. Difficile d’envisager entame plus ratée.
Fort heureusement, les américains de The National tombent à point nommé pour lancer véritablement notre festival. Un set en parfaite adéquation avec l’ambiance "soleil déclinant en pleine nature". "Rock’n’roll bordel !" entend-on à l’arrière du public. Difficile, en effet, de compter sur les new-yorkais pour lancer un pogo. Bien qu’on les ait connus plus inspirés quelques années auparavant, leur set, majoritairement dédié à leurs opus récents, demeure des plus rafraîchissants.
Retour sur la grande scène pour Mano Solo. Quand bien même la musique du fils de Cabu ne nous transporte guère, l’ensemble demeure sympathique à regarder. Un petit moment.
Place maintenant au Black Rebel Motorcycle Club. Notre dernier rendez-vous avec les californiens remontait à près de cinq ans : un remplacement au pied levé des White Stripes à Reading au sommet de leur gloire avant un Elysée Montmartre à l’automne. Grandeur et décadence. Après deux albums incompris, Black Rebel Motorcycle Club ne surfe plus sur le haut de la vague. En effet, à l’heure du tout éphémère, leur néo psyché se voit rangé depuis des lustres parmi les antiquités de pépé à prendre la poussière. Qu’importe, avec un batteur remplaçant, Robert Turner et Pete Hayes perpétuent les traditions : gros son, lunettes noires, attitude poseuse… Néanmoins, cette mise à l’index apparaît ce soir encore injuste. En effet, les nouveaux titres ne sonnent même pas honteux. Les extraits de Howl s’agencent à merveille aux indémodables vieilleries que sont "Red Eyes & Tears" ou "Whatever Happened To My Rock & Roll". Sans surprise, le public surchauffé de Furia Sound leur fera un triomphe, au point d’en faire un des highlights du week-end.
C’est ensuite au son de "Initials B.B." que les BB Brunes font leur apparition sur la grande scène. Sous les hurlements des adolescentes disposées aux avant-postes, sous les quasi-huées des grands frères positionnés à l’arrière et dans l’indifférence des familles assises en amont. L’occasion d’enfin se faire une opinion sur le phénomène hexagonal de cette année. Atout principal du quatuor : son énergie à revendre. Enfin à vingt ans de moyenne d’âge, l’inverse aurait été inquiétant…
Musicalement, les parisiens n’inventent pas grand-chose mais le résultat s’avère convaincant, quoiqu’un peu épuisant sur la longueur. Passons maintenant aux désagréments. Le look façon Hedi Slimane, bien éculé, plus faux tu meurs. Tous les clichés du rock façon premier degré. Un mauvais goût caractérisé pour les reprises : "These Boots Are Made For Walking" ainsi que "I Beg You Look Good On The Dancefloor". Plus problématique maintenant : les paroles. Sorte de poésie adolescente assez bancale, voire carrément niaise par moment. Pas mauvaise dans l’absolu mais avant tout générationnelle. Objectivement, les BB Brunes peinent, à tous points de vue, à nous emballer. Force est néanmoins de leur reconnaître un réel pouvoir d’attraction sur une partie du public. Le genre de gang dont nous aurions pu être membre à leur âge.
Direction maintenant le chapiteau pour applaudir Why? qui n’en finit plus d’écumer les scènes françaises avant un copieux retour prévu à l’automne. Remarqués en 2006, les californiens ont cette année franchi un palier supplémentaire avec Alopecta, leur plus grande réussite discographique à ce jour. Imprévisible carambolage de styles allant du folk au hip hop, la musique de Why? apparaît plus posée, presque plus structurée sur scène. Bucolique sur fond de soleil couchant.
Retour sous le chapiteau le deuxième jour pour Today Is The Day, orchestre de troubadours métalliques issus du Tennessee. Pas inintéressant dans l’absolu mais le concept du bruit pour le bruit trouve quand même assez rapidement ses limites – comme ses adeptes d’ailleurs.
Même à leur apogée au début des années 2000, les Stereophonics s’apparentaient déjà à un groupe de foire. Qu’attendre donc d’une énième tournée estivale des gallois ? Plus encore qu’à l’époque, il apparaît clairement que les Stereophonics n’étaient pas de la même race que les Oasis, Blur, Pulp, Suede et consorts... Dix ans après la bataille, ne reste que les mauvais côtés : les lunettes noires pour masquer le vide, des compos tournant désespérément à vide, une apparente décontraction histoire de masquer l’ennui. A peine si quelques simples préhistoriques réussiront à sauver leur prestation du marasme intégral.
Comme de bien entendu, les Comets On Fire donnèrent dans la foulée la prestation du week-end. Malheureusement, le public s’y est fortement trompé laissant les californiens perdus face à quelques dizaines de spectateurs... Consternant. D’autant que leur réputation n’est plus à faire : aucun groupe actuel ne pouvant mieux qu’eux revendiquer le titre de gardien du temple rock seventies. Ouragan de riffs, hurlements : une orgie sonique sans limite que les vénérables Allman Brothers n’auraient pas dénigré.
Après des débuts vaguement prometteurs en 2003, Cali n’a toujours pas réussi à résoudre son insolvable dilemme : comment faire de la variété française à succès tout en conservant une crédibilité rock ?
Deuxième éclaircie dans cette journée avec Envy, passés maîtres dans l’art du post-rock métallique. Fortement influencés par Mogwai, les japonais fascinent littéralement leur audience. A deux doigts de l’hypnose collective.
Au final, quoi retenir de cette douzième édition du Furia Sound Festival 2008 ? Un cadre définitivement exceptionnel, une programmation particulièrement diversifiée et souvent de qualité, mais dont les avantages demeurent les inconvénients : à vouloir ratisser une audience trop large, la courbe d’appréciation du spectateur risque de ressembler à une succession de montagnes russes. Comme les découvertes inexistantes…
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