De par la situation maritime et ensoleillée de Bénicassim, il est très facile d’arriver assez tard aux premiers concerts de la troisième journée du FIB 2008 qui ont lieu vers 18h, surtout après la fatigue et l’alcool de la veille.
18h40 : C’est ainsi que je rata sans gros regrets le duo mixte anglais The Ting Tings, groupe giga-fashion du moment, à la CSS sans le côté électro (ils jouent partout au Royaume-Uni et même un peu aux USA : fulgurant succès).
J’espère que les Anglais du festival étaient réveillés à cette heure peu avancée de la matinée pour faire du air guitar sur leur tube entêtant "Shut up and let me go".
20h00 : Oups, pardon : 20h30. Le groupe rockab’ Heavy Trash (avec véritable contrebassiste et gomina) de Jon Spencer et Matt Verta-Ray a une demi-heure de retard. D’ailleurs, ils semblent débarquer de leur avion tant rien n’est en place et surtout tant le son en façade est pourri ! L’ingé-son semble complètement dépassé et désabusé. Jon Spencer essaie sans cesse d’haranguer la foule de par ses trop nombreux "Ladies and Gentlemen !" ; les musiciens mettent de la bonne volonté, la voix est plongée dans une réverb hyper 50’s mais rien n’y fait, le son est tellement une bouillabaisse que l’ambiance dans le public, quand il ne déserte pas, est proche de celle d’un concert de musique classique. Grosse déception donc car à l’écoute de l’album, on se dit qu’il y a clairement moyen de foutre le feu. Peut-être à revoir dans un petit club.
20h30 : Résultat, la foule s’agglutine encore plus autour de José Gonzáles et sa guitare acoustique sur la petite scène Fibclub. Joli moment d’une douceur extrème passé en compagnie du plus argentin des suédois. La foule réagit énormément dans les premiers rangs ; le reste discute et semble plutôt attendre la suite des concerts, tout comme moi car voilà que se présente…
21h00 : …The Brian Jonestown Massacre sur la grande scène.
On s’attend toujours à ce que tout aille à volo avec l’ultra charismatique Anton Newcombe et son groupe plus ou moins reformé depuis que le fameux documentaire Dig ! est sorti.
Mais cette époque de bastons sur cette scène est révolue depuis qu’ils repartent en tournée. Même le public sombre de moins en moins dans la provoc qui tentait d’attiser le courroux d’Anton. Ainsi, on peut bien mieux apprécier ses énormes talents de songwriter.
Justement, aujourd’hui, l’ambiance est bon enfant ; Anton joue toujours à gauche de la scène comme pour surveiller le groupe et il sourit régulièrement en plaisantant souvent avec ses acolytes.
Parmi eux est enfin revenu mon idole, Joël Gion, le tambourine man aux rouflaquettes surdéveloppées qui trône au milieu de la scène. Il a trop la classe le Joël, avec sa veste sans manches et son fameux air de débile mental. Anton se félicite d’ailleurs du retour de son compère et le dit au micro ; Joël répond : "You’ll make me cry, Anton...".
Par hasard, un feu d’artifice démarre dans la ville, juste derrière la grande scène.
Ce concert étrangement festif des BJM se déroule sans encombre et Anton demande même régulièrement au groupe quels morceaux ils peuvent enchaîner, comme s’il n’y avait pas de setlist définie.
A la fin, il reste de la place pour deux morceaux, annonce Anton ; il n’y en aura finalement qu’un seul puisqu’un réaccordage de sa guitare prendra trois minutes dans un étrange silence. Sinon, bonne ambiance et bon son = public ravi.
21h30 : Avec tout ça, pas le temps d’aller voir Eef Barzelay, le leader de Clem Snide, qui a apparemment conquis la petite scène de par son country-rock mélancolique. Idem pour American Music Club qui est à l’autre bout du festival sur la scène Fiberfib. Dommage, la pop de ces Californiens est vraiment sympa et planante. Ils feraient un bon plateau en compagnie du prochain groupe à passer sur la Escenaria Verde.
22h30 : My Morning Jacket (from Kentucky) tente d’enflammer la grande scène avec son rock assaisonné de folk et de solos de guitare bluesy derrière un chant atmosphérique en voix de tête.
L’introduction avec le morceau "Evil Urges" donne le ton de leur set : planant, mais régulièrement servi par une batterie binaire avec un kick lourd.
Les grattes sonnent bien grassement ; l’ambiance est sympa, peut-être un peu trop "papa" ». Mais le public restant semble avoir la banane.
23h00 : Tricky est attendu par près de 12000 personnes sous la tente Fiberfib, mais pas par moi.
Je regarde d’un œil distrait dix minutes de concert depuis un des côtés de la scène : l’atmosphère, visuelle ou sonore, est très sombre.
Tricky se démène sur des morceaux pas très enflammants, devant un public semblant mitigé. La presse du lendemain ne sera pas convaincue non plus.
00h00 : The Kills : Jamie "Hotel" Hince est fidèle à son slim ; Alison "VV" Mosshart semble désormais habillée par un couturier. Pour elle, fini la frange de douze mètres ; désormais, avec la raie au milieu et les cheveux toujours longs, on peut enfin contempler son joli minois.
Hotel n’arrête pas ses moonwalks latéraux et semble se déplacer sans bouger les jambes (sans doute une vieille ruse indienne pour capter l’attention quand on est que deux sur scène). Sa guitare Hofner sonne toujours aussi dégueulasse et sourde : parfait. VV est sublime, comme d’hab, mais peut-être un peu moin rock’n roll qu’avant et un peu plus mannequin pour Vogue. En parlant de ça, Kate Moss ne serait actuellement plus avec Hotel, VV serait jalouse, mais tout ça on s’en fout.
Leur album Midnight Boom est bien représenté durant le set avec par exemple en opening "URA Fever" : grosse ambiance dans le public.
Un peu plus tard, "Alphabet pony", "Getting down", avec ses soupirs saccadés, enchaîné avec "Cheap and cheerful" feront même danser une bonne partie de l’audience.
La grande scène n’est peut-être pas l’endroit idéal pour les Kills : deux musiciens avec un beat électronique + guitares + voix, peuvent rapidement lasser, d’autant que Mika ne leur a pas prêté son décor de cirque et ses danseuses. Mais désormais, le set est étoffé ; après 3 albums, les morceaux charismatiques, voire les tubes, sont légion. D’ailleurs, les Kills se permettent de ne pas rejouer "The Good Ones" : dommage quand-même.
00h30 : Les Allemands de Booka Shade font s’agiter sous la tente Fiberfib ceux qui n’aiment pas The Kills par leur set électro-80’s.
Et peu après, les Mexicains de Da Punto Beat font se trémousser la petite scène de par leur électro-funky-house avec guitare et basse.
01h30 : The Raconteurs : Le groupe des deux chanteurs/guitaristes Jack White, Brendan Benson accompagnés par la section rythmique des Greenhornes, enchaîne sur la grande scène.
C’est incontestablement le concert le plus attendu de ce soir (du festival ?), vu la densité de la foule. Quand ces musiciens charismatiques, en vogue et n’ayant plus rien à prouver créent un groupe pour se faire plaisir, ça donne à chaque fois un concert assez énorme ; et c’est le cas ce soir.
Leur décor est planté avec leur fidèle "R" écrit sur une toile énorme typée armoiries qui descendra sur le fond de la scène. Celle-ci évoque une ambiance mi-saloon, mi théâtre. Les deux leaders sont lookés cow-boy avec jean et stetson pour Brendan, gilet imprimé d’ossements et futal cavalerie pour Jack. Celui-ci a encore une touche incroyable, surtout sa coupe de cheveux épaisse et bouclée tout droit sortie des meilleurs toiletteurs.
Et ça commence avec du lourd, "Consoler of the lonely", titre éponyme du dernier album, qui fout le feu d’entrée, enchaîné avec "Hold-up", autre titre jouissif. Brendan chante peut-être un peu moins souvent, mais lui officie sur les quelques morceaux un peu plus tranquilles, comme "Many shades of black". Jack électrise toujours par ses solos au son bluesy/crado, par exemple sur "Level", et hurle souvent dans un micro 50’s raccordé à un ampli donnant un son de vielle radio nasillarde.
Au milieu du set arrive le gros tube du premier album "Steady, as she goes", apparemment devenu mythique tant le public hurle les bras en l’air lors des premières notes. D’ailleurs, les musiciens laissent traîner l’intro environ une minute, le temps que l’audience prenne ses marques pour le pogo du refrain.
C’est à ce moment précis que le record de jets simultanés de gobelets de bières dans la foule a été battu. Les flashs des lights entourant la scène crépitent par centaines (de kilowatts) jusqu’à la fin du show.
L’ovation finale durera un sacré moment et le groupe saluera en faisant la révérence, comme au théâtre. Bravo, bravissimo.
Les Raconteurs avaient déjà fait un cover du "Crazy" de Gnarls Barkley au festival Lollapalooza 2006 ; cela aurait été de bon aloi à Benicàssim pour une transition en douceur, mais il n’en fut rien.
03h00 : Les Gnarls Barkley de Danger Mouse et Cee-Lo prennent donc la suite mais comme nous venons de vivre un pur moment de rock, nous les évitons. De toute façon, leur set est toujours le même, avec le tube "Crazy" à la fin. En attendant, l’imposant Cee-Lo fait admirer sa texture vocale en se transformant en preacher sur les morceaux rapides où il pousse sa voix, ou en prenant l’air tout tristounet quand la chanson est mélancolique.
Tout ça, sur un fond musical chiadé soul-groove (mais avec de vrais musiciens et pas que des samplers, ouf…).
S’en suit enfin pléthore de dj’s sur 3 scènes.
Avec un live électro minimal des berlinois Metope, un mix électro des autres allemands Tiefschwaerz, un mix house du dj français habitué du FIB Ivan Smagghe, un mix plus acid par le canadien John Acquaviva… |