La reverb sur des chansons folk intimiste suffît trop souvent à faire crier au génie et à la diva du siècle. En fait, cela sert surtout à rendre plus souple et plus chaleureux ce qui risquerait d'être insuportablement rêche et barbant.
Mais ce n'est pas une règle absolue et Alela Diane lors de la sortie de son premier album, Pirate's Gospel, avait prouvé, avec une voix quasi naturelle et un filet de voix, somme toute et quoi qu'on en dise pas si exceptionnel que cela, qu'il était possible de faire bien sans faire trop, d'émouvoir sans faire dans le cliché larmoyant.
Aujourd'hui, la demoiselle revient avec Headless Heroes, une formation qui sent bon (?) le groupe concept réuni autour d'un seul et unique projet.
En l'occurrence, le projet est de faire chanter la charmante Alela un certain nombre de reprises, folk et rock, dans un univers sonore résolument folk mais aux arrangements soyeux, ambiance club cosy, à grand renfort de basses lancinantes et de cuivres.
The Silence of Love proposera donc, parmi les reprises les plus sympathiques, une relecture acoustique de "Just like honey" des Jesus and Mary Chain, ou encore "Nobody's baby now" de Nick Cave.
Sans être aussi original qu'on veut bien le faire croire (il existe des tas de versions "non noisy" de "Just like honey"), les reprises sont toujours pleine de délicatesse et d'élégance.
Pourtant, on aura parfois un peu de mal à ressentir l'émotion sur certains titres dont les ingrédients semblent pourtant là. C'est par exemple le cas de "Hey who really cares ?", ballade minimaliste qui ressemble trop à une comptine récitée avec trop d'application.
Mais ce n'est pas le cas de la majorité de l'album fort heureusement et nombre de reprises sont reussies même si la magie de la voix de Diane n'est pas toujours aussi bluffante et chaleureuse qu'on l'espérait. Et quand elle en fait trop, on se croirait débarquer dans un space opéra ("See my love") démontrant néanmoins ses capacités vocales.
Certains titres manquent aussi de "violence", ou peut-être d'âme tout simplement, même si la volonté de l'interprétation est d'apporter plus de douceur que de douleur. Mais on est tout de même déçu du manque d'intensiter dramatique dans "Nobody's baby now".
Quoi qu'il en soit, pas d'ennui sur The Silence of Love, jouant des ambiances entre un jazz rappelant des Elysian Fields en petite forme et un folk délicat, plus directement lié à l'univers, tel qu'on le connaît d'Alela Diane. Un bel album de reprises en tout cas qui a les qualités et les défauts de celui d'une certaine Chan Marshall qui, le temps d'un Jukebox, avait réussi à marier (elle aussi) le beau et le bobo.
The Silence of Love est un joli disque tout de même, pas bien méchant
mais pas désagréable, à ranger précieusement aux côtés de
l'indiscipliné Hank de The The et de l'élégant Satisfied Mind des Walkabouts et qui trouvera régulièrement sa place sur votre platine, ne serait ce pour quelques blind test thématiques. |