"J'aimais
déjà les étrangères"
relate un intrigant flash back sur une liaison qui ressortit
à la fois de la banalité, un jeune homme célibataire
avec une femme mariée, et de l'intrigant qui excite la
curiosité du lecteur. Cette dualité donne bien
le ton à de ce qui apparaît vie comme une divagation
auto-fictionnelle du narrateur.
Intrigant parce que la dame qui se prénomme O, quoique
sans accent circonflexe, est une énigmatique slave torride
et licencieuse qui porte des bottes orange en peau de python
et, non pas le numéro 5 de Chanel mais la dernière
fragrance du huppé parfumeur newyorkais Bond n°9.
Intrigant parce que le protagoniste anonyme est un trentenaire
looser plutôt mou, féru de littérature,
et notamment de Jack London, qui manifeste une compulsion quasi
autistique à se situer géographiquement au point
que rien n'est ignoré de ses déplacements soigneusement
décrits d'après les stations de métro et
le nom très précis de rues et de lieux parisiens.
De quoi subodorer une relation hors norme. Or rien de tel,
avec des expressions fin de siècle, il vient dans les
bras de la femme qu'il possède et qui se donne, une sexualité
sommaire, voire désincarnée, et un manque total
d'affect. Le narrateur est davantage un arpenteur de ses fantasmes
dont les pérégrinations embrassent la vacuité
des lieux branchés du moment ayant pour épicentres
l'hôtel Raphael, paradis luxueux pour le "people",
le quai de Jemmapes et ses estaminets vintage et le Palais de
Tokyo, qualifié de point de rencontre de tous les malentendus
qui assurent le succès des plasticiens conceptuels.
On demande où tout cela va mener le narrateur comme
le lecteur. Pas très loin en définitive puisque
le serpent se mord la queue, un énorme boa constrictor
qui entretemps aura avalé lecteur tout cru en un peu
plus de deux cent pages. Ce que, finalement, Alexandre
Kauffmann réussit fort bien. |