Il fait un temps d’hiver
typique : froid et ensoleillé.
Quand j’arrive sur le quai de La Guinguette Pirate, j’aperçois
trois personnes avec de gros sacs sur le dos et dans les mains :
Tex La Homa. “Salut je suis Sean
de Talitres. Je vais te présenter Tex La Homa.”
Celui avec la guitare, c’est Matt Shaw
qui est à lui tout seul TEX LA HOMA. Gish
s’occupe des claviers : il accompagne Matt sur scène
depuis Novembre 2003.
Voilà quelques heures qu’ils sont arrivés de
Londres où ils ont passé la nuit. Matt est vraiment
sympa: il aime causer de sa musique, très personnelle et
qui mêle avec brio des sons electro et acoustiques. En plus,
il est heureux de jouer à Paris.
Cette interview est un peu historique : Froggy Delight rapporte
ici la première interview de Tex La Homa réalisée
sur le sol français juste avant le concert du soir et pour
la sortie de If
just today were to be my entire life.
Alors lisez attentivement ce qui suit :
Tex La Homa, c’est deux personnes ce soir
?
(Matt) Oui, je chante, joue de la guitare et ajoute
quelques effets. Gish a une table de mixage sur scène. Nous
utilisons beaucoup d’effets différents et de samples.
Si tu prends le CD, le son de ce soir sera plus naturel.
Tes chansons vont-elles ressembler aux versions
du CD ?
(Matt) Certaines d’entre elles oui. Cela sera
dans le style de l’enregistrement mais cela ne peut pas être
exactement la même chose. Certaines seront complètement
différentes, entièrement acoustiques et sans batterie,
ni autres instruments avec seulement des effets sur ma voix et la
guitare.
Sur le CD, certains morceaux ont été enregistrés
avec une batterie, certains avec des rythmes qu’on ne peut
que créer en studio. En live, nous pouvons manipuler le son
avec les tables de mixage. Ainsi nous pouvons contrôler ce
que nous faisons, où nous allons, travailler sur le beat
par exemple. Nous créons différentes versions des
chansons. Nous sommes plus libres de faire ce que nous voulons et
nous adapter à la réaction du public.
Que préfères-tu : jouer avec un groupe
ou seul ?
(Matt) Je préfère être proche
d’une ou deux personnes et pas plus. Cela me permet d’avoir
plus de contrôle pour expliquer comment les morceaux sont
construits, quel son utiliser. Et je n’ai pas besoin de gérer
différentes personnes qui ont l’habitude de jouer à
des rythmes différents.
Quand tu joues live c’est toujours avec les
mêmes personnes ?
(Matt) Non, les personnes sont toujours différentes.
(regardant Gish) En ce moment, pour la tournée actuelle,
nous sommes seulement deux. Parfois une troisième personne
nous rejoint.
(Gish) Notre collaboration a commencé en Novembre
2003.
(Matt) Notre premier concert ensemble était
effectivement en Novembre. Avant que Gish n’arrive, il y avait
toujours des membres différents, qui venaient et partaient
puisque la majorité jouait dans d’autres groupes.
N’as tu jamais pensé travailler toujours
avec les mêmes personnes ?
(Matt) A partir de cette tournée je crois c’est
bon. Cela fonctionne très bien [ndlr : avec Gish].
Les gens disent que ta musique est la BOF de films
imaginaires. Es-tu d’accord avec eux ? Pour écrire
utilises-tu de vraies images ou les imagines tu en composant ?
(Matt) La plupart de mes chansons sont basées
sur des choses réelles qui sont arrivées, à
moi ou à des amis. Il s’agit d’une observation
des choses que je vois. La plupart des morceaux partent de la vie
courante et parfois s’en éloignent : ils deviennent
plus "cinématiques".
Mais tout est basé sur la réalité et beaucoup
sur des observations visuelles.
Mais qu’est-ce qui t’influence le plus
: les sons que tu entends ou les images que tu vois ?
(Matt) C’est un mélange des deux. J’ai
des mélodies dans la tête, des mélodies qui
traversent mon esprit, et j’essaie de les transférer
concrètement avec mon ordinateur ou ma guitare. Mon inspiration
vient de la réalité qui m’entoure et de ce que
je pense.
Les paroles sont-elles importantes pour toi ?
(Matt) Oui bien sûr. J’aime des chansons
comme « in the clouds » qui parle des choses qui se
produisent dans nos relations avec les gens ou de ce que l’on
ressent lorsqu’on est amoureux. Par exemple, je décris
les différentes phases d’une relation : quand tout
va très bien mais aussi quand tout va mal.
Les paroles sont sur le site : il faut cliquer sur la pochette de
l’album pour y accéder.
Sur "In the clouds" justement, ta voix
est plus forte que sur les autres morceaux. Utilises-tu ta voix
comme n’importe quel autre instrument ?
(Matt) Tout à fait. De plus en plus souvent,
mes nouvelles chansons sont comme "In the clouds" : je
chante vraiment dessus. Quand j’ai commencé, je parlais
ou chuchotais, tout était plutôt calme et je mixais
la voix très bas. Les paroles étaient déjà
importantes pour moi mais je mixais toujours ma voix très
bas parce que j’essayais d’arranger tous ces sons ensemble,
comme sur le premier album.
Sur "If just today were to be my entire life", je chante
plus et ma musique est plus mature. J’ai sorti le premier
CD quand je n’avais encore vraiment joué live.
J’ai commencé dans ma chambre avant d’aménager
un studio où je joue vraiment. J’ai développé
mon "projet de chambre" et comme j’ai voulu jouer
live, j’ai évolué.
Qui est la fille qui chante sur "Never boring"»
?
(Matt, amusé) C’était moi ! J’ai
chanté très haut et ai rajouté quelques effets.
Ma soeur joue sur le disque mais elle ne chante pas. C’était
intéressant de travailler avec elle parce qu’elle n’est
pas vraiment musicienne et elle ne joue pas dans un groupe. Elle
joue de la flûte.
Ta musique apparaît comme une lutte entre
des sons acoustiques et des sons ambient ou électroniques.
Parfois, c’est le côté electro qui l’emporte,
parfois c’est le côté acoustique. Ressens-tu
les choses comme ça ?
(Matt) C’est juste. Cependant quand je m’assoie
pour composer, je ne sais pas à l’avance si cela va
être un morceau électronique ou plutôt acoustique.
J’ai une idée de la façon dont je vais commencer
le morceau et les choses évoluent d’elles-mêmes.
Parfois cette idée m’emporte sur un côté
plus électronique mais ça dépend. Une chanson
comme "In the clouds" a été écrite
à la guitare acoustique puis il y a une progression et des
arrangements. Des chansons comme "When you close your eyes"
ou "of electronic origin" ont commencé avec un
beat, puis j’ai ajouté des textures puis j’ai
arrangé le tout. Je ne sais pas vraiment comment ça
se passe quand j’écris une chanson.
Parfois vous reprenez Sophia. As-tu des relations
particulières avec ce groupe ? Faites vous d’autres
reprises ?
(Matt) J’ai repris Sophia parce que je suis
un grand fan de The Godmachine. J’ai vu The Godmachine live
il y a des années quand ils ont tourné en Angleterre.
Quand le groupe s’est séparé parce que Jimmy
est mort, j’ai acheté le premier Sophia et je l’ai
apprécié. A l’époque tu ne voyais pas
Sophia dans la presse. Ils étaient plutôt underground
et c’était dur à trouver. Maintenant ce groupe
est plus populaire mais là où j’ai joué
ce moreau, pas beaucoup de gens connaissaient Sophia et quand je
reprenais leur morceau, les gens pensaient que c’était
un morceau de Tex La Homa. Comme je tiens un journal sur le net,
j’ai écrit que j’avais repris "So slow"
et un internaute belge m’a contacté pour savoir si
j’avais enregistré sur CD le morceau. Je lui ai répondu
que non mais nous l’avons fait dans la foulée et lui
avons envoyé. C’est juste pour internet, pas pour un
CD. J’ai apprécié de faire ça.
Il a mailé à Robin (ndlr : de Sophia) qui m’a
répondu : il a apprécié notre version.
Nous ne faisons pas souvent de reprises même si j’aime
la plupart des groupes du début des années 90, comme
My Bloody Valentine (ndr : écoutez donc "Never boring"
sur le dernier album de Tex La Homa). Quand j’ai enregistré
mes premières chansons, Loveless venait juste de sortir et
j’ai été influencé par ce mouvement.
Aujourd’hui encore, My Bloody Valentine semble être
partout dans la presse certainement parce que Kevin Shields a composé
la BOF de "Lost in translation" et qu’il joue avec
Primal Scream
Quand j’ai vu le CD, j’ai été
surpris par les photos mais je trouve que cela va très bien
avec ta musique. Comment as-tu rencontré Masayuki Miyoshi
?
(Matt) Il m’a envoyé un email il y a
deux ans en m’expliquant qu’il aimait Tex La Homa et
qu’il souhaitait travailler avec moi sur un projet. A cette
époque, je n’avais pas de site web et comme il est
web designer, il a fait le site de Tex La Homa. Nous sommes restés
en contact mais je ne l’ai jamais rencontré en personne.
Il m’a envoyé un tas d’images un peu comme celles
qui sont utilisées pour le CD et j’ai bien aimé
le graphisme. Il travaille avec pas mal d’autres groupes dont
Her Space Holidays. C’est une relation qui dure, qui a commencé
avec le site web et qui s’est poursuivi avec la pochette de
l’album parce qu’il comprend comment ça sonne.
Nous nous échangeons des images et essayons d’assembler
les choses mais je contrôle l’aspect visuel. Je contrôle
comment on voit et comment on entend Tex La Homa. La présentation
est très importante.
Masa a un très bon œil.
Pour finir, peux tu décrire ta musique en
trois mots ?
(Matt) Personnelle Ambiante Réfléchie |