Spectacle
conçu et mis en scène par Lotfi Achour, avec Thierry
Blanc, Marcel Mankita, Ydire Saïdi et Lê Duy Xuân.
L'actualité politique relativement récente avec
la loi du 23 février 2005 louant les "bienfaits"
de la colonisation française en Afrique du Nord et le
fameux discours de Dakar du 26 juillet 2007 à l'Université
de Dakar ont réveillé le spectre du passé
colonial français.
Simultanément, deux spectacles à l'affiche parisienne
traitent de la colonisation, telle qu'elle a été
légitimée et véhiculée dans l'inconscient
collectif et ce à partir de montages de documents de
toute obédience qui illustrent la représentation
dévalorisante et humiliante de l'indigène.
Contrairement à "Folies coloniales" de Dominique
Durcel qui se focalise sur l'Algérie et démontre
la collusion des tous les acteurs politiques, l'impérialisme
étatique, l'appétence de conquête des militaires,
le prosélytisme des religieux, l'intérêt
des potentats industriels et même le rayonnement de la
civilisation française pour les utopistes, Lofti Achour
a choisi de mettre en scène "La comédie indigène"
en l'étendant à l'ensemble des continents tout
en se concentrant sur la représentation dégradante
de la figure du colonisé sous couvert de considérations
anthropologiques pseudo-scientifiques.
Comme l'écrit Adel Hakim, directeur du Théâtre
des Quartiers d'Ivry dans la présentation de ce spectacle
: "Là aussi, il vaut lieux en rire. Et en chansons.
Comme chez Labiche !".
Bien évidemment, la farce est grotesque et burlesque
et la charge corrosive car impossible d'oublier les tragédies
humaines que révèlent, par exemple, une chanson
comme "La fille du bédouin" ou l'embrigadement
des tirailleurs sénégalais et la perception de
l'altérité sous tendue par le racisme et la xénophobie
demeure effrayante car il n'est pas sûr qu'elle appartienne
tout à fait au passé.
Cinéaste, Lofti Achour adopte une mise en scène
très cinétique sur le mode du fondu-enchainé
qui lie judicieusement les différents tableaux et une
scénographie comportant de jolis moments poétiques.
Il a réuni une distribution pluri-ethnique épatante
avec trois comédiens, Thierry Blanc,
Marcel Mankita et Ydire
Saidi, et une chanteuse Lê Duy
Xuân, qui, forçant un peu le trait, incarne
des personnages archétypaux à l'humanité
qui peut être abominable ou profondément touchante. |