Une fin d’après-midi printanière, au centre de Paris, dans une cuisine orange toutes fenêtres ouvertes, c’est au son des oiseaux qu’on entame une petite conversation avec Jil, leader de Jil is Lucky.
Peux-tu nous présenter ton groupe, Jil is Lucky ?
Jil : Eh bien moi c’est Jil ! Jil is Lucky, ce sont mes initiales. Les autres musiciens, je les ai rencontrés au fur et à mesure de mes voyages, de mes errances. Je compose, j’écris et ensuite on travaille ensemble tout ça et ça fait Jil is Lucky.
Et ces musiciens que tu as pu rencontrer au fur et à mesure de tes voyages, ils ne sont pas tous francophones du coup ?
Jil : Incroyablement si ! En fait, entre 12 et 18 ans j’avais un groupe de reprises, on jouait du rock, du punk dans les bars… mon guitariste de cette époque est parti à Berlin et je l’ai retrouvé là-bas. Par la suite, on a voyagé ensemble et on est allé à Prague. Sur place, on a rencontré Arnaud qui jouait du violoncelle dans un orchestre de rue. Le batteur était un ami de mon guitariste, qui a habité New-York et Berlin également. Maintenant, on est tous installés à Paris et c’est cool !
Quand est né Jil is Lucky officiellement ?
Jil : Il y a deux ans en fait. Quand on s’est tous réellement mis à travailler ensemble sur ce projet.
Donc ce concert que vous aviez fait il y a deux ans aux côtés d’Izabo à la Maroquinerie…
Jil : C’était notre tout premier concert en fait !
Cette histoire avec la musique a pour toi commencé il y a bien plus longtemps. C’est une longue histoire, une histoire de famille. Avec ton frère, vous êtes tous les deux musiciens (ndlr : Bensé est le frère de Jil, également membre de Jil is Lucky) ?
Jil : Oui en fait, j’ai un oncle qui a une radio et une web radio basées dans le sud. On a grandi là-dedans avec les vinyles partout, la musique et il jouait de la guitare donc il nous a appris à en jouer. On a très vite baigné dans la musique, très vite eu envie/besoin de jouer, de monter un groupe, de faire des reprises, de faire des concerts… faire les cons quoi !
Mais alors si tu n’avais pas été musicien, tu aurais pu faire autre chose ?
Jil : Oui oui, d’ailleurs je fais d’autres choses… je peins, je dessine et si je ne faisais pas du tout de musique je passerais mon temps à sculpter.
Tu te serais épanoui à travers une autre forme d’art ?
Jil : L’écriture aussi me plait beaucoup, j’écris énormément. Ça ou de la sculpture.
Pour en revenir à l’album, combien de temps vous a-t-il fallu pour que celui-ci voit le jour, entre le travail d’écriture et sa sortie ?
Jil : Il nous a fallu deux ans. Quand je suis arrivé à Paris, on s’est réuni pour jouer. Au bout de deux mois, on a trouvé une maison de disque, il y en avait quelques unes qui étaient intéressées donc on a eu l’opportunité de pouvoir choisir. On a fait quelques dates, dans la foulée on a enregistré notre premier EP, fait une tournée et enregistré notre album juste là. On a tous fait super vite !
Tu disais que c’était toi qui écrivais les textes. L’inspiration vient de tes nombreux voyages mais il y a sûrement d’autres choses qui t’inspirent, les relations humaines, le quotidien…
Jil : L’inspiration est beaucoup dans le quotidien et le voyage peut aussi être intérieur. Essayer d’avoir un point de vue différent sur les rencontres qu’on peut faire, les tableaux qu’on peut voir dans la rue… en plus on est dans une société qui essaie de comprimer les passions alors que ce modèle, on le voit en ce moment, est en plein déclin, ce regain de communautarisme, d’extrémisme religion, l’ultra-consommation aussi… et au milieu de ça, partout il y a des passions qui sont en train d’exploser, il y a de la poésie dans le déclin en fait.
Justement en parlant de religion, on pense à la pochette de l’album. Ces représentants des principales communautés religieuses en power-rangers, c’est intriguant ! Y a-t-il un message particulier que tu voulais faire passer à travers cette pochette ?
Jil : Sur la pochette, on voit que je suis pieds et poings liés avec eux, avec ce monde, c’est effectivement quelque chose que je prends au sérieux mais en même temps je le tourne en dérision. Je voulais mettre en évidence le côté surréaliste des conflits religieux, des textes. Le guerrier surréaliste de ma génération, c’est Bioman, Power Rangers. La religion, je suis lié à ça même si aujourd’hui je suis profondément athée, j’ai fait 10 ans de catéchisme, j’ai fait ma bar-mitsva, mes ancêtres viennent d’Afrique du Nord, c’est un bon mélange…
La religion t’a plutôt épanoui ?
Jil : A travers les voyages, j’ai changé de points de vue, parce que lorsqu’on te donne quelque chose à la naissance, ça peut devenir un fardeau mais si tu prends du recul, que tu l’analyses, ça peut devenir une richesse. Prendre du recul et comparer, pour que tout ça devienne une richesse, ensuite ça devient une source d’inspiration naturelle et spontanée.
Toutes ces inspirations, ces voyages se retrouvent dans Jil is Lucky, notamment dans l’utilisation de certains instruments et du travail des sonorités. Certaines d’entre elles nous font voyager à l’Est. Est-ce que vous avez prévu de tourner dans certains pays de l’Est justement ?
Jil : Notre maison de disques essaie d’exporter le disque à l’étranger. En ce qui nous concerne, prendre la route, voyager, on sait le faire, en tout cas on voudrait bien le faire mais ça s’organise un minimum, en tout cas dans certains de ces pays. On va voir pour organiser ça. Mais les distributeurs intéressés pour le moment, ce sont plutôt les pays scandinaves : Suède, Norvège ou aussi l’Angleterre et les Etats- Unis. Mais effectivement, on ferait bien une tournée à l’Est.
En parlant de concerts, il y a quelques jours, vous étiez en première partie de Bensé au Bataclan. Comment s’est passé ce concert ?
Jil : C’était super ! Super accueil, plein de gens dans le public connaissaient, il y avait plein de lunettes en coeur dans le public. Le Bataclan, c’est une grande et superbe salle.
D’ailleurs, quelle est l’histoire de ces fameuses lunettes en cœur ?
Jil : Ce sont des lunettes que j’ai toujours eues depuis que je suis gosse et je les ai toujours gardées pour faire le con, ça me faisait marrer.
Parce que certains fans commencent à effectivement porter les mêmes…
Jil : Oui, on en a vendu pas mal en fait. Mais ce n’est pas juste une histoire de merchandising parce que lorsqu’on fait un concert, on a notre date mais le lendemain ou le soir même, on aime faire un autre concert dans un petit truc, un bar. Et pour financer les déplacements ou la journée supplémentaire, il nous faut du liquide. La vente de disques et de lunettes nous sert à ça.
Y a-t-il une salle, une scène que vous aimeriez faire plus particulièrement, que ce soit en France ou à l’étranger ?
Jil : Non pas vraiment, tout m’attire. J’aime rencontrer le public quel qu’il soit. Comme j’ai toujours eu l’habitude de jouer dans des bars, j’aime jouer devant un public qui ne me connaît pas. A l’inverse, la semaine dernière on était en tête d’affiche au Point Ephémère, c’était sold out, on a passé un super moment, mais jouer n’importe où, en festival devant 15 000 personnes ou dans un rad avec 4 mecs, on prend le même plaisir.
Et toi, est-ce que tu as l’occasion d’aller voir des artistes en concert ? Est-ce qu’il y a des choses que tu as vues récemment et qui t’ont marquées ?
Jil : Oui j’y vais souvent. Récemment j’ai vu Loney Dear à la Black Session de Lenoir, c’était mortel, son dernier album est vraiment classe. Et j’ai vu aussi M Ward au Café de la Danse, super classe aussi.
Pour revenir à l’album, est-ce que tu lis les chroniques, les critiques qui paraissent ?
Jil : Oui, en fait la maison de disque nous fait suivre ces choses là oui.
Tu n’as jamais peur de tomber sur quelque chose de désagréable ?
Jil : Pour le moment, on a reçu un tel accueil, aussi bien des journaux un peu pointus ou plus généralistes, c’est très cool !
Pour conclure, si tu n’avais que trois mots pour parler de ta musique, lesquels seraient-ils ?
Jil : Train, babouche, nuage.
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